L'animosité c'est comme la sympathie, ça se communique sans s'expliquer.
T
out lui dire et partir, tout lui dire et partir. Ce moto, incapable de quitter son esprit, qui tournait en boucle au creux de son crâne quitte à ce que ce dernier menace d'exploser. Tout lui dire. Et partir. Dans l'une comme dans l'autre de ces ambitions, il y avait quantité d'incertitudes menaçantes pour une once très légère d'espoir, qui ne suffisait malheureusement pas à la convaincre. Depuis que le professeur Xavier leur avait révélé, à elle et à Pietro, la vérité sur leurs origines, elle se voyait tout bonnement incapable de penser à autre chose. Elle n'avait que peu vu Magnéto depuis, mais à chaque fois, la même pensée s'imposait en elle. Elle avait envie de tout lui dire, de lui cracher les faits au visage comme on se débarrasserait d'un secret trop longuement gardé, quand bien même ce dernier n'était jeune que de quelques semaines. Lui dire la vérité, et après quoi ? Partir... Car oui, plus que jamais, elle voulait s'en aller, quitter les confréristes, suivre la voie de son frère, être libre et ne plus obéir aux ordres de celui qui avait bien failli tuer Pietro... qui l'avait tué, en quelque sorte. Mais en sachant la vérité, est-ce qu'il la laisserait partir, sous le seul prétexte qu'elle était sa fille ? Est-ce qu'il ne chercherait pas, plutôt, à se réapproprier l'enfant rebelle qui par une fois lui avait échappé ? Elle n'en savait plus rien... Elle devait y réfléchir... Et au fond, c'était sans doute une décision qu'elle n'était pas en droit de prendre seule. Mais plus elle y pensait, plus elle se torturait, c'était sans fin.
Et en attendant, elle n'avait d'autre choix que de passer pour la parfaite confrériste qu'elle se devait de rester aux yeux de Magnéto tant qu'elle-même ne savait pas précisément où elle en était. Rien de moins simple quand ses préoccupations étaient aux antipodes des exigences de son "clan". Si tant est qu'on puisse le nommer ainsi tant elle s'en sentait éloignée, tant elle s'était même appliquée à le trahir, notamment dernièrement, en participant à l'évasion du colosse végétal qui heureusement s'en était sorti indemne. Elle revenait tout juste d'une mission relativement fructueuse, prête à délivrer son rapport à Magnéto en prenant le plus grand soin d'occulter ses pensées les plus sombres en sa présence, mais il n'était pas là. Quelque part, elle était soulagée qu'il ne soit pas présent, d'un autre côté, il ne lui restait plus qu'à demeurer dans un état d'errance relative, à présent, jusqu'à son retour. D'errance et de solitude. Ou pas. Puisque des pas se rapprochaient.
Ce n’est pas la première fois que j’hésite à emmener le clébard au QG de la Confrérie. Mais aujourd’hui comme toutes les autres fois, j’en arrive à la même conclusion : cela me ferait bien chier de l’avoir constamment dans les pattes et de plus, c’est la seule chose qu’il me reste d’Evans. Certes, il n’y avait rien entre nous de plus qu’une complicité parfaite, mais ces jours-là sont révolus. Et je n’irais certainement pas dire qu’il comptait pour moi. Sûrement pas. Ce n’est absolument pas pour ça que j’ai gardé son clébard. J’ai donc enfermé de nouveau Buddy dans mon appartement avant de rejoindre le QG. Pour une fois, je suis en business officiel ou plutôt officieux, puisque c’est l’une de ces fois où je viens prévenir un mutant. L’un d’entre eux, dont je ne citerai pas le nom, m’a demandé de surveiller une certaine affaire au FBI, en échange d’un service. Après lui avoir donc transmis l’information, nous sommes quittes. J’aime bien quand les gens me doivent un service, on ne sait jamais quand on aura besoin d’eux.
C’est donc vêtue de ma tenue traditionnelle de travail (costume, chemise blanche et badge du FBI dans la poche) que je traverse les couloirs du QG. J’allais partir aussi vite que je suis arrivée, après tout, ce n’est pas par amour que je viens ici, loin de là. Ma loyauté envers les Confréristes est discutable, je dirais que ça dépend des jours, mais j’ai un marché avec Magnéto et jusque-là ça a bien marché pour moi. C’est une entraide en sommes. Car la seule véritable personne en qui j’ai vraiment confiance et que je sers, c’est moi-même. Mais ne laissons pas mes convictions ruiner cette histoire. Car voilà la petite Wanda que j’aperçois dans le couloir. Moi qui pensais pouvoir m’éclipser sans qu’aucun autre mutant ne vienne me faire chier, je me suis mis le doigt tellement profondément dans l’œil que j’ai touché… hum… bref, passons.
« C’est con que le grand manitou ne soit pas là, hein ? » Non pas que ça me concerne et peut-être que Wanda ne voulait pas du tout voir Magnéto, mais j’ai entendu dire qu’il n’était pas là (c’est aussi l’une des raisons pour lesquelles je suis venue au QG maintenant, marre de ce vieillard en train de me psalmodier pourquoi il faut être un bon Confrériste) et comme nous ne sommes pas très loin de ses quartiers, qui sait ? J’ai une chance sur deux d’avoir vu juste. De plus, elle a l’air de revenir tout juste de mission. Je ne suis pas agent du FBI pour rien, faire les connexions entre les choses et tirer des conclusions c’est mon boulot. J’appuie mon épaule gauche contre le mur alors, les bras croisés nonchalamment sur ma poitrine, ayant finalement décidé de lui taper la causette, Buddy peut attendre. On va s'amuser un peu, tiens.
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W
anda n'avait rien d'une solitaire dans l'âme. Elle savait accepter la compagnie d'autrui quand celle-ci était bonne, mais à l'heure actuelle, elle aurait quand même largement préféré être seule. Certes, dans l'attente du retour de Magnéto, il ne lui restait qu'à attendre, et l'attente est toujours plus longue quand elle se vit seule (encore que certaines compagnies très gênantes peuvent parfois les rendre plus embarrassantes encore), mais qui que soit la personne qui allait à présent lui faire face dans ce couloir, ce serait forcément une personne avec qui elle n'avait pas envie de passer du temps, parce que ces derniers temps, elle tolérait ses confrères confréristes bien plus qu'elle ne les appréciait (si elle les avait jamais appréciés, ce qui n'avait rien de certains).
Il s'agissait de Leviana. Bon, ce n'était pas en soi la pire compagnie qu'elle puisse craindre (même si on ne pouvait clairement pas dire qu'elles étaient en bons termes pour autant, loin s'en faut) - elle aurait pu tomber sur Liv, à la place... pour prendre un exemple, comme ça, au hasard - mais elle se la serait bien épargnée malgré tout. Elle avait un peu espéré que la jeune femme se contente de la croiser, à la limite de lui adresser un quelconque "bonsoir", avant de tracer son chemin. Mais apparemment, ce n'était pas le cas. Elle avait plutôt envie de parler, ou de l'emmerder, ce qui revenait sans doute sensiblement à la même chose. En tout cas, l'entrée en matière donnait sans mal le ton. Elle haussa les épaules pour ne pas donner le sentiment d'être aussi incommodée qu'elle l'était bel et bien par l'absence de Magnéto, mais elle doutait fort d'être convaincante.
-J'ai le temps, se contenta-t-elle de répondre... Le temps d'attendre, de cogiter, de repenser encore et encore à sa conversation avec le professeur Xavier jusqu'à ce que ça la rende complètement folle. Du fun en perspective, donc. Elle avait le temps dans une certaine mesure, mais elle se disait que plus tôt elle verrait le "grand manitou", mieux ce serait. Tu sais depuis quand il est parti ?
Comme si elle était sa secrétaire personnelle, ou comme si Magnéto rendait des comptes à qui que ce soit sur ses allées et venues... Enfin bon, Leviana savait au moins qu'il n'était pas là, alors elle avait déjà un peu d'avance sur elle.
« Hum… je sais pas… peut-être que oui, peut-être que non… » Je fais mine de réfléchir. C’est tellement facile de la faire tourner en bourrique. Mais comme d’habitude, il faut que je m’engage dans des choses qui ne me concernent pas. Et comme d’habitude, je ne pense pas non plus que ça va se retourner contre moi. Non, parce que je suis trop confiante et que les choses se passent toujours comme prévu. Après tout, Wanda est dangereuse, je suis tout à fait au courant de ce qu’elle peut faire, même si je ne l’ai jamais vu en action de mes propres yeux, j’ai entendu toutes les rumeurs et j’ai une excellente imagination. Après, jusqu’où les rumeurs exagèrent, ça je n’en sais rien, mais je sais aussi que lorsque mes propres pouvoirs échappent à mon contrôle, ça fait des ravages. Ce serait d’ailleurs drôle de voir qui est la plus dangereuse de nous deux. Mais je ne suis pas venue l’emmerder pour ça, pas initialement du moins. « Aucune idée. » Je hausse les épaules pour faire bonne mesure et mon sourire ne pourrait être plus carnassier. « Je sais juste qu’il n’est pas là. C’est tout. » En vrai, je n’en ai absolument rien à foutre de ce que fait Magnéto, de ses va-et-vient. Je ne suis ni sa mère, ni sa secrétaire.
« Si j’étais toi… » je me tourne sur le côté, alignant mes omoplates avec le mur de façon à appuyer mon dos dessus et non plus uniquement mon épaule gauche, adoptant une position plus confortable et qui indique clairement que je ne compte pas bouger de si tôt « …je ne perdrais pas mon temps à attendre. Sauf si c’est urgent. Il t’as pas laissé un numéro pour le contacter en cas d’urgence ? » Bien sûr que je me moque, mais uniquement parce que c’est tellement facile de taquiner Wanda vu qu’elle parait si innocente. Et que c’est juste dans ma nature d’emmerder le monde. Principalement parce qu’il m’emmerde au quotidien. « Qui sait, il est peut-être parti à l’autre bout du monde. À moins qu'il ne soit allé aux putes. Ou il a peut-être juste envie qu’on lui foute la paix… » Ce qui ne serait pas du tout son genre au vieux schnock, vu la détermination avec laquelle il croit en sa cause, mais passons.
Bien sûr que j’ai d’autres choses à faire, mais emmerder Wanda est tellement plus passionnant que d’aller promener le clebs. De plus, il peut attendre, une heure de plus ou de moins ne changera pas grand-chose dans sa routine de clébard. « Au pire, peut-être que tu peux demander à ton frangin Speedy Gonzales d’aller prévenir le grand manitou ? Ça devrait être facile pour lui, vu la vitesse à laquelle il va. Je me demande d’ailleurs s’il s’est déjà pris un arbre. » Parce que j’ai déjà conduit une voiture à plus de 150 km/h et je sais à quel point c’est difficile de gérer un bolide lancé à cette vitesse, surtout quand notre vision se réduit considérablement en mode tunnel avec la vitesse.
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L
a réponse de Leviana ne lui apprit absolument rien. En même temps, qu'attendre d'autre de la part de son interlocutrice ? Elle n'aurait même pas dû l'interroger sur la présence ou non de Magnéto. D'une part il n'y avait pas forcément de raisons pour qu'elle sache où il se trouvait et quand il reviendrait, d'autre part, même en disposant de cette information, elle ne la lui livrerait sans doute pas, ou alors moyennant paiement, seulement. Bref, c'était couru d'avance. Bon, elle acceptait tout de même de lui donner la réponse, et celle-ci ne devait pas particulièrement l'éclairer au demeurant. Elle ne savait pas. Evidemment, qu'elle ne savait pas... et en attendant, il y avait de fortes chances pour qu'elle reste coincée là pour un moment, à ruminer ses sombres pensées.
Leviana le lui dit d'office, ça ne servait à rien de l'attendre.. Comme si Wanda allait écouter la moindre de ses recommandations. Il était évident que non, et elle le savait. Et par ailleurs, elle n'avait nulle part où aller. De même, pas de commentaires pour les cas d'urgence. Dans tous les cas, c'était lui qui créait les cas d'urgence, pas elle. Même si lui parler de ses origines relevait sans doute d'une sorte d'urgence, mais qu'elle n'allait pas écouter... à tort, peut-être. Elle grimaça quand elle lui fit remarquer crument que le chef de la confrérie été potentiellement allé aux putes. L'air de rien, cette pensée a dérangeait d'autant plus maintenant qu'elle savait qui il était pour elle et le pourquoi du lien qu'elle avait ressenti entre eux sans le comprendre pour autant.
-Je suis pas certaine que Magnéto ait très envie de le revoir, tu vois, répliqua-t-elle d'un ton las quand son interlocutrice évoqua Pietro... Elle n'aimait pas quand on parlait de lui au sein de la Confrérie. Certes, il était hors de danger à présent, mais ce n'était pas pour autant qu'il était vu d'un bon oeil, et pour cause, il avait abandonné le groupe... Et ce genre de choses ne se faisait tout simplement pas. Qu'est-ce que tu fais ici, toi ? demanda-t-elle ensuite.
Elle n'était pas juste là pour lui accorder l'immense privilège de l'emmerder, si ?
Les paroles de Wanda m’intéressent soudain lorsqu’elle mentionne que la relation entre Magnéto et Pietro est loin d’être à son meilleur. Ce qui me fait lever un sourcil interrogateur, croiser les bras sur ma poitrine et afficher mon sourire de requin qui réclame d’en savoir plus. « Je sais bien que Pietro est le genre à faire des conneries et à se mettre, volontairement ou non, l’ensemble du monde à dos, mais de là à se friter avec le grand manitou… qu’est-ce qu’il a donc fait pour mériter un tel honneur ? » Je suis plus que curieuse sur le coup. Je n’ai jamais dit que je m’intéressais pas aux ragots, seulement ceux qui sont juteux à souhait et qui pourraient m’intéresser en matière d’information. Il est toujours bon de savoir qui est dans les bonnes grâces de qui, après tout, une grande partie de la communication repose sur l’entende ou non que les gens ont entre eux. Et ces choses là sont fluides, changent constamment et sont utiles à savoir, notamment pour réclamer des services.
J’aurais aussi pu ignorer la question de Wanda ou bien lui sortir l’un des mensonges habituels. Je suis douée pour cacher mes traces, que ce soit dans mes relations personnelles, professionnelles ou bien dans mes affaires. Dans mon domaine, ça va de soit que de savoir mentir. Mais le tout est de savoir à qui mentir, quand et comment, qu’est-ce qui me serait le plus utile. La seule personne à qui je n’ai jamais menti, c’est mon patron, pour l’unique et bonne raison que je ne lui dis simplement pas tout. Il ne demande pas et le sait pertinemment. C’est l’une des choses que l’on pourrait me reprocher, mais la quantité de bon travail que je fournis et toutes les enquêtes que j’arrive (parfois même magnifiquement) à finir pèsent suffisamment favorablement dans ma balance pour qu’il laisse certains de mes défauts passer. Nous ne sommes pas parfaits, même lui a des choses à se reprocher et tant qu’il ne fout pas son nez dans mes affaires, je ne foutrais pas le mien dans les siens. Une sorte de cohabitation pacifique en sommes. Oui, je pourrais mentir à Wanda.
« Je suis venue échanger des informations contre un service, l’habituel. » J’hausse les épaules. J’ai beau ne pas avoir échangé ce genre de choses avec elle, le mutant avec qui je viens de commercer n’est pourtant pas le premier et sans doute pas le dernier. Et ce n’est pas comme si je cachais mon badge en entrant, je suis même plutôt fière de l’exhiber. L’uniforme et l’arme, ça impressionne en général, surtout venant d’une femme. Et tout le monde sait que je travaille pour le FBI et donc que j’ai accès à certaines informations. C’est juste à moi de tracer la ligne à ne pas franchir avec ce genre de marchés. Et je regarde Wanda, me demandant si elle m’a posé cette question par pure curiosité ou pour faire passer le temps, ou bien si elle-même voudrait échanger quelque chose contre des informations ou un service.
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W
anda oubliait quelquefois que ce qui lui semblait à elle primordial ne l'était pas pour le reste du monde et que des informations qui lui paraissaient à elle cruciales et de notoriété publique ne l'étaient pas pour tout le monde. Il ne lui était par exemple pas venu à l'esprit une seule seconde que son interlocutrice ne puisse pas avoir connaissance du départ de Pietro de la Confrérie. Ce dernier avait tout de même eu le temps dans l'intervalle d'être traqué, assassiné au sens propre du terme (et de se taper son assassin par la suite, mais ça...) puis relaxé, à sa manière, du moment que Wanda ne trahissait pas la confiance de celui qui s'avérait être... leur père. Bref, elle avait l'impression que mille vies s'étaient écoulées entre le moment où Pietro avait décidé de trahir Magneto et qu'elle avait refusé de le suivre et le moment présent. Mais Leviana n'avait rien suivi de tout ça, sans doute parce que personne n'avait jugé nécessaire de l'en informer, y compris les principaux concernés... ce qui n'était pas illogique en soi mais prenait un peu la sorcière rouge au dépourvu.
-Il a décidé de quitter la Confrérie... ça fait un moment, répondit-elle sans entrer davantage dans les détails. Elle n'estimait pas que ce soit nécessaire quoi qu'il en soit. Il n'y avait rien de plus à en dire de toute manière, elle considérait que ces quelques mots suffisaient en eux-mêmes à justifier l'animosité (tout à fait réciproque) entre Pietro et Magneto... même si au moins, le jumeau de Wanda avait évité le pire. Enfin, plus ou moins...
Pour ce qui était d'expliquer les raisons de sa présence, Leviana se montra tout aussi laconique qu'elle avait pu l'être à l'instant. Et tout comme elle avait intrigué son interlocutrice l'instant d'avant, Wanda ne pouvait s'empêcher de se sentir un peu curieuse, de s'interroger quant à la nature des informations que la jeune femme pouvait avoir à échanger, tout en supposant qu'il devait forcément y en avoir plus d'une au vu du poste qu'elle occupait au sein du FBI.
-Et tu as des informations intéressantes ?
Elle devrait peut-être mettre un terme à la conversation dans l'instant plutôt que d'insister. Mais elle était curieuse. Et n'avait accessoirement pas grand-chose de mieux à faire.
C’est dans ces moments-là que je suis brutalement rappelée par l’univers tout entiers que non, je ne sais pas tout et que oui, j’ai de nouveau merdé quelque part. Parce que j’aurai du le savoir que Pietro avait décidé de se la jouer AWOL et que c’était pour ça que le grand manitou a pété un câble la dernière fois que je lui ai parlé. Je dois avouer que mon égo vient d’en prendre un sacré coup, parce que j’aurai clairement du le voir venir, d’une part en connaissant la personnalité de Pietro, mais aussi d’autre part en prêtant plus attention aux ragots que j’ignore à moitié au sein de la Confrérie. On dirait bien que j’aurai du m’y intéresser un peu plus cette fois-ci et je me retiens de toutes mes forces de me mordre les lèvres, tic qui indique que je sais que j’ai merdé et que je suis en train de chercher un moyen de ne pas perdre la face.
Après une brève seconde de silence, une morsure des lèvres et mon regard qui passe du mur d’en face au visage de Wanda pour confirmer qu’elle n’est pas en train de se foutre de ma gueule, j’hausse les épaules, comme si la situation ne me concernait en rien. Ce qui est le cas, mais passons. « Ça ne m’étonne pas. » Et même si je voudrais sortir l’excuse du ‘je ne suis pas si souvent que ça à la Confrérie récemment’, je ne ferais pas à Wanda le plaisir de lui avouer que je ne savais rien de cette histoire.
Mais heureusement, je n’ai pas à m’expliquer, car elle enchaîne sur la qualité de mes informations et je ne peux m’empêcher cette fois-ci de sourire. « Ça dépend pour qui et qu’est-ce que j’ai à y gagner. Je suis au courant de beaucoup de choses dans des domaines très différents grâce à mon job et aux différentes personnes que je côtoie en dehors. » Je n’irai pas non plus jusqu’à lui donner une liste précise, parce que la majorité de ces contacts ne sont pas si légaux que ça ou bien pourraient briser ma réputation, mais sans risque pas de gains qui en valent la peine. « Tout dépend de ce que tu cherches. Pourquoi ? Tu serais intéressée par quelque chose en particulier ? »
Peut-être que cela a quelque chose avoir avec le fait qu’elle cherchait à rencontrer Magnéto avant que je ne croise sa route. Peut-être que cela a quelque chose avoir avec le départ de Pietro et les foudres qui ont suivies. Peut-être qu’elle a des plans secrets dont personne n’est au courant. Les possibilités sont infinies et peut-être que je réussirai à en apprendre quelque chose si je creuse davantage. De toute façon, ce n’est pas comme si j’avais quelque chose de mieux à faire, là tout de suite.
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D
e ce que Wanda parvenait à décrypter du comportement de son interlocutrice, il semblait assez évident que cette dernière n'était effectivement pas au courant du départ de son frère. Au fond, ce n'était pas si important. Si Leviana s'avérait ne pas être au courant de tout, ce n'était pas plus mal, même si c'était semble-t-il son point fort, et en définitive, qu'elle ait su ou non pour le désistement de son jumeau n'y changeait pas grand-chose, le résultat était le même : ils étaient dans deux camps opposés, et il lui manquait (même si elle était parvenu à un accord tout relatif et très fragile avec Magnéto pour protéger la vie de son frère... et dont elle avait du mal à deviner la tournure si elle devait décider de tout lui dire...). Bref, pas la peine de faire dans le sentimentalisme, et certainement pas en présence de Leviana. Elle ne savait même pas pourquoi elle laissait durer la conversation, pourquoi elle n'y mettait pas un terme. La curiosité, très certainement... conjuguée au fait que, à l'heure actuelle, elle n'avait franchement rien de mieux à faire.
Est-ce qu'elle était vraiment intéressée par quelque chose en particulier ? Eh bien, pas vraiment, pour le coup. Elle avait plus posé la question... pour dire quelque chose, et parce qu'elle se demandait ce qu'elle pouvait avoir de plus confidentiel à communiquer, mais en vérité, elle n'était pas certaine de pouvoir ni de vouloir marchander quelque information que ce soit contre quoi que ce soit... parce que sa confiance en Leviana restait limitée. Certes, elle se doutait bien du fait qu'elle devait posséder des informations en béton armé, au vu de sa profession, mais elle n'était pas certaine qu'elle se montrerait très conciliante à l'idée de les lui communiquer, et elle ne pensait pas forcément, par ailleurs, avoir grand-chose à lui proposer en retour. Elle n'avait pour elle que ses pouvoirs - certes puissants - et pas grand-chose d'autre. Wanda haussa les épaules.
-Peut-être. Peut-être, oui, parce qu'en fait, parmi les rares "services" qu'elle supposait son interlocutrice capable de lui rendre, si elle avait le bras assez long, elle en avait peut-être un à l'esprit, mais qui n'était pas, disons... dans son habitude. Mais je manque de monnaie d'échange, admit-elle ensuite.
Jusque-là, je suis restée dans ce couloir pour faire chier Wanda, car je n’ai plus rien à faire à la Confrérie, je suis venue régler ce que j’avais à régler et ce n’est pas comme si c’était le meilleur endroit du monde où passer la soirée. Je suis par exemple capable de citer au moins une quinzaine d’endroits dans les USA réunis où on peut passer la meilleure nuit de notre vie (et Las Vegas ne compte pas). Mais après la dernière phrase qu’elle vient de me dire, ma curiosité en est encore plus piquée qu’avant. Certes, j’étais curieuse de savoir ce que Pietro a encore fait comme connerie et ce que Wanda pourrait bien vouloir au grand manitou, mais je pourrais aussi me passer de ces informations. Je ne suis pas si curieuse que ça et puis ce sont majoritairement des ragots destinés à satisfaire ma commère interne et à bien me faire rire. Mais ce qu’elle vient de me dire à l’instant, c’est ce que j’appelle le genre de curiosité professionnelle, le genre dont je pourrais tirer profit.
« C’est vrai que pour l’instant, rien ne me vient à l’esprit sur ce que tu pourrais m’échanger contre des informations… » Wanda n’est ni la personne la plus riche, ni la plus influente du coin et je ne vois pas vraiment ce qu’elle pourrait m’apporter en plus. Mais j’ai appris il y a bien longtemps à ne pas sous-estimer la valeur d’un service et de ce que quelqu’un doit à quelqu’un d’autre, surtout lorsque des gens vous doivent quelque chose et que vous avez les moyens de les forcer à vous le rendre s’ils ne le souhaitent pas. « Après, il existe des services de tout genre et si ce que tu as à m’offrir ne m’intéresse pas aujourd’hui, cela ne veut pas dire que ça ne m’intéressera pas demain. » Et puis, je dois avouer que j’aime quand les gens me sont redevables, ça instaure une dynamique de puissance assez intéressante.
« Encore faudrait-il que je sache qu’est-ce que toi tu voudrais obtenir comme informations, parce que mon réseau est large et varié et que chaque chose a son prix. Une information tirée d’un étudiant de Harvard et une information tirée de l’un de mes cas au FBI n’ont rien avoir et par conséquent ne valent pas du tout la même chose. Et puis, même si aujourd’hui tu ne sais pas quel genre d’informations tu souhaites obtenir, n’oublie pas que je suis toujours ouverte à la négociation et que je ne compte pas changer de boulot d’ici demain. Donc n’hésite pas à remettre le sujet sur la table si les choses deviennent plus claires. » Et je n’hésite pas à ajouter un sourire carnassier, comme pour lui rappeler que je compte bien être toujours dans les parages, comme une ombre attendant le meilleur moment pour bondir tel le prédateur qu’elle cache.
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A
u fond, et Wanda le savait pertinemment, elle ferait mieux de s'épargner cette conversation et de vaquer à ses occupations sans plus se soucier de Leviana. Cette situation n'avait absolument rien de bon pour elle, et si tant est qu'elle doive faire preuve de la naïveté dont elle ne disposait pas tout à fait, en dépit des apparences, le sourire carnassier qui s'était affiché sur le visage de son interlocutrice la mettrait bien assez en garde. Elle était incapable d'entretenir la moindre relation saine avec qui que ce soit (en ce compris les personnes auxquelles elle tenait le plus - en effet, on ne pouvait pas franchement saluer l'équilibre dans sa relation avec Pietro ou encore avec Vision), il n'était peut-être pas nécessaire d'en rajouter une couche et d'éveiller d'un peu trop près l'attention de son interlocutrice aux dents longues. Alors oui, il était sans doute préférable qu'elle rebrousse chemin et ne dise rien de plus, mais Wanda avait comme dans l'intuition que Leviana ne la lâcherait pas de sitôt à présent qu'elle lui avait laissé entrevoir une voie d'accès, si infime soit-elle. Et puis, cette conversation avait fait naître dans son esprit une idée qu'elle avait du mal à refouler... aucune idée quant à son moyen de paiement, mais elle avait de la ressource, tout de même. Ses pouvoirs étaient loin d'être les moins puissants et les moins utiles possibles (eh, apparemment, elle pouvait ressusciter les morts, maintenant, alors...), donc c'était toujours négociable. Et dans le pire des cas... elle était capable de se défendre contre son interlocutrice, au besoin. Malgré tout, elle hésitait. Pas seulement au regard des répercussions ou de l'éventuel paiement qu'il lui faudrait soumettre. Mais parce que Pietro la tuerait. D'un autre côté, c'était peut-être lui qui crèverait, si ça continuait.
-Donc, dit-elle avec prudence, en toute conscience du fait qu'une fois qu'elle aura prononcé les mots en venir, elle aura peine à revenir en arrière. Si je te demandais de rassembler des informations capables de faire couler une flic qui est aussi une criminelle notoire, ce ne serait pas un problème pour toi ?
Maintenant que c'était dit, elle ne pouvait pas le retirer. Et après tout, est-ce que ce deal était risqué ? Pas forcément tant que ça.
J’ai toujours trouvé les études sur le système de récompense intéressantes, majoritairement pour améliorer mes capacités en négociation et surtout en manipulation. Parce que la peur, bien qu’elle soit un outil très efficace, n’est pas forcément la solution à tous les coups. Parfois, la promesse de donner à quelqu’un ce qu’il désire le plus au monde est une meilleure stratégie. En effet, l’être humain réagit mieux à la récompense qu’à la menace et c’est incroyable le nombre de choses que l’on peut faire faire à quelqu’un si la récompense est adaptée, même des choses que cette personne refuserait catégoriquement de faire en temps normal. Un peu comme les animaux que l’on dresse à effectuer certains tours en échange d’une gâterie.
Et la mise en place de ce genre de système commence par une offre facile et difficilement refusable. Des études ont ainsi montré que si l’on demande l’heure en premier à un passant dans la rue avant de lui demander s’il n’a pas un peu de monnaie, il y a plus de chances pour que la personne accepte de nous donner une pièce si elle a déjà dit oui pour l’heure. Et agiter une carotte devant un âne pour le faire avancer est très semblable sauf que cela met en place un système de récompense, une promesse que l’autre personne recevra quelque chose qu’elle veut vraiment. Un peu comme agiter un beignet devant une personne au régime. Et le fait que Wanda semble être si intéressée par la possibilité des informations que je pourrais fournir m’indique que j’ai déjà un pied dans la porte.
La spécificité avec laquelle elle décrit la personne qu’elle souhaite détruire me tire un sourire, car j’ai ma petite idée quand à son identité. Et je pense ne pas me planter, connaissant le peu de mutants qui correspondent à cette description. Car, oui, je suis persuadée que c’est une personne que Wanda connait bien, connait très bien même. On ne voue tout simplement pas ce genre de haine envers un parfait inconnu. À ce niveau-là, c’est sûr c’est personnel. Et ça ne pouvait pas tomber mieux, la haine étant un sentiment délicieusement irrationnel.
« Je ne peux rien te promettre pour l’instant, mais il n’y a personne en ce bas monde qui me tienne suffisamment à cœur pour ne pas lui nuire. Donc, ce ne sera pas un problème de mon côté, je ne dois rendre de comptes à personne et ça pourrait même être drôle. Mais ce n’est pas une promenade de santé, ce que tu m’annonces là. Je ne dis pas que c’est impossible et, en plus, je ne recule jamais devant un défi honnête, mais le paiement va devoir être à la hauteur de la tâche. Surtout qu’on parle de flic là, avec la loi derrière elle et le côté criminel hurle des dangers de toute autre sorte. Pas que ça me fasse flipper, au contraire. » J’en dirais même que c’est excitant.
Je garde le silence un instant, tout en continuant d’observer Wanda. « Je dois t’avouer que tu m’intéresses là. Si tu me confirmes le nom, je vais voir ce que je peux commencer à glaner de mon côté comme infos. Et si tu sais avec précisions ce que tu veux, n’hésites pas à me le dire, ça m’évitera de perdre mon temps. Et pour le paiement, disons que tu me dois un service. Un jour viendra quand je déciderai de le réclamer, peu importe quand, peu importe ce que ce sera. Marché conclu ? » Après m'être décollée du mur, je m’approche d’elle en lui tendant la main. Et si elle a l’impression que le diable est en train d’essayer de lui faire signer un pacte, elle n’a pas forcément tord : je me sens d’une humeur diabolique ce soir.
L'animosité c'est comme la sympathie, ça se communique sans s'expliquer.
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anda était totalement partagée, d'un côté, elle regrettait déjà ce qu'elle était en train de faire, parce qu'elle n'aurait pas un sentiment différent si le diable en personne lui proposait de passer un pacte avec lui... et puis, elle savait qu'il y avait de fortes chances pour que Pietro l'apprenne et lui en veuille à mort, même si elle agissait pour son bien (et ce n'était pas la première fois qu'elle manigançait dans son dos - Charles Xavier pouvait en témoignait -, en même temps, elle n'y pouvait rien du tout, absolument rien, si quand elle cherchait à le raisonner en face à face, il ne l'écoutait pas)... mais d'un autre côté, elle avait peut-être l'occasion de se débarrasser d'un problème qui prenait de plus en plus d'importance. Elle se voyait difficilement cracher dessus. Elle savait qu'elle ne reviendrait pas en arrière, les mots étaient prononcés, ça n'avait pas été pour rien. Oui, bien sûr, elle pourrait tout simplement se raviser et tracer son chemin en faisant comme si elle n'avait jamais rien dit. Mais voilà, c'était trop tard, à présent. Et donc, elle allait accepter. Elle travaillait avec Magnéto... quand on y réfléchissait, elle n'était plus à un pacte diabolique près.
-Marché conclu, soupira-t-elle en acceptant la main tendue de son interlocutrice.
Elle contractait donc une dette envers elle, et elle sentait bien que ça allait être particulièrement délicat pour la peine. Mais là encore, elle n'était plus à ça près. Elle était sur la corde raide, et cela faisait un bon bout de temps. Voilà pour le marché. Leviana avait l'air intéressée, voir amusée par la proposition en question... et au vu de ce qu'elle disait, même si elle ne le confirma pas complètement en soi, elle comprit bien qu'elle avait deviné le nom de la personne qu'elle voulait incriminer. En même temps, si l'on faisait le tour de ses relations (si tant est que Liv en soit vraiment une), la déduction était simple à faire. ... Est-ce qu'elle faisait tant de mal que cela ? Non, elle voulait réduire au silence une criminelle... ce n'était pas un mal. Même si ses motivations étaient égoïstes.
-Je suis sûre que tu sais très bien de qui je parle.
Il m’est déjà arrivé de contempler parfois des moments que certaines personnes qualifieraient de magiques, d’autres d’inoubliables, d’autres encore de changeants. Le genre de moment où tu sais que ce qui va se passer va définitivement changer la donne, que l’on ne pourra pas retourner en arrière, que les choses seront changées à tout jamais. Bien souvent, c’est le genre de moment dans un film d’horreur où tu te dis « oh merde… ». C’est le genre de moment où une chose s’achève et une autre commence. Comme le moment où un fauve bondit sur sa proie ou encore celui où le moucheron vient de se coincer dans la toile d’araignée. Le moment où une force domine sur une autre, la décimant, un moment qui entraine des conséquences souvent désastreuses. Et là tout de suite, avec Wanda, j’ai l’impression de vivre ce genre de moment. Est-elle le moucheron et moi l’araignée ? Est-ce que ce ne serait pas plutôt Liv la panthère sur le point de bondir sur nous deux ? Ou bien Liv serait la pauvre gazelle ne se doutant de rien ? Je ne saurais le dire et chacune de nous trois pourrait autant tomber dans le cliché de la proie que du prédateur, en fonction de comment la situation va finir par tourner.
En tout cas, il est indéniable qu’au moment où nos mains se serrent pour sceller notre marché, des choses vont changer. Comme une promesse d’action, de nouveauté. Pour le meilleur ou pour le pire, nous le verrons bien. Et je ne pouvais être plus excitée à l’idée de le découvrir. Aussi vite que nos mains se sont touchées, elles reculent, comme brûlées par le contact. « J’ai ma petite idée. » Quel doux euphémisme. Je m’appuie de nouveau contre le mur, épaule touchant la pierre, le froid ne m’atteignant pourtant pas à travers la triple couche d’uniforme que forment ma chemise, mon costume et mon manteau. « Tu as de la chance, je ne porte pas Liv dans mon cœur. » À vrai dire, je ne porte personne dans mon cœur. Plus maintenant. « Mais c’est la seule ici pour laquelle j’ai ce qui se rapproche le plus d’un respect mutuel, ou du moins, j’arrive le mieux à la supporter. Sans vouloir t’offenser. » Mon sourire carnassier revient. Ah, moi et ma façon brutale d’insulter quelqu’un avec qui je viens de passer un accord. Mais bon, on ne se refait pas.
« Ça ne devrait pas être un problème de te fournir ces informations. Ce que tu en fais, par contre, c’est ton problème, cela ne me concerne plus. Si Liv apprend que je suis ta source, yolo. » Je hausse les épaules avec ça. « Qu’elle vienne, si elle a des comptes à me rendre, je l’attends et ce ne serait pas la première fois. Mais mon rôle dans tout ça s’arrête à l’apport d’informations. Si tu te fous dans la merde, tu t’en sors toute seule. » Je soupire, soudain sérieuse, malgré mon ton léger qui ne change pas et mon regard qui reste fixé sur Wanda. « Je préfère te prévenir, je suis sur le point de frapper une fourmilière avec un très gros bâton. Réfléchis-bien à la façon dont tu vas t’y prendre, Liv n’est pas une rigolote. » La preuve, c’est un peu ma Némésis en ce qui concerne nos personnalités et notre façon de voire le monde. En ce qui concerne nos pouvoirs, je ne sais pas vraiment, vu que nous ne nous sommes jamais affrontées directement et de toutes nos forces.
L'animosité c'est comme la sympathie, ça se communique sans s'expliquer.
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anda savait que quand son interlocutrice affirmait qu'elle avait sa "petite idée", elle voulait plutôt dire qu'elle savait pertinemment à qui elle faisait référence, et elle le lui fit comprendre une bonne fois pour toutes en prononçant le nom de sa bête noire entre tous : Liv. Bien sûr qu'il s'agissait d'elle. Outre le fait que la liste était assez courte si l'on ne s'intéressait qu'aux flics susceptibles d'être dans son collimateur, il n'y avait pas à chercher très loin pour comprendre que la sorcière rouge la haïssait profondément. Leviana affirma qu'elle ne portait pas Liv dans son coeur. Tant mieux. C'est sûr que ça aurait été le risque, de découvrir que les deux s'entendaient très bien. Mais elle n'y avait pas vraiment cru. Elle ne pensait pas, en vérité, que ni l'une, ni l'autre, soit capable de porter qui que ce soit dans son coeur (y compris Liv, oui - surtout elle d'ailleurs -, en contrepartie de ce qu'elle prétendait ressentir pour son frère). Leviana précisa tout de même que Liv était la seule pour laquelle elle éprouvait un semblant de respect... Quelle idée... mais bon, au fond, Wanda s'en moquait, et elle ne risquait pas de se sentir offensée par son propos, parce que elle-même n'avait pas le moindre respect pour son interlocutrice. Ce n'était pas comme si elle en attendait tant de sa part.
Elle ajouta qu'elle ne lui adresserait que des informations, et que ce serait à elle d'en faire ce qu'elle voudrait, à ses risques et périls. Et tant mieux, c'était ce qu'elle voulait. Elle n'avait pas l'intention de laisser toute la basse besogne à son interlocutrice, elle tenait à affronter Liv directement. Elle n'ignorait pas que sa décision, son acte, auraient d'immenses conséquences. Mais elle était prête à les assumer. Liv n'aurait jamais que ce qu'elle méritait. Leviana n'avait pas besoin de la prévenir, elle avait déjà affronté Liv, elle savait à quoi s'attendre. Mais elle pensait pouvoir avoir le dessus.
-Je sais, j'en fais mon affaire, se contenta-t-elle de répondre.
Elle avait déjà arrachée une aile au corbeau, elle se sentait prête à lui en arracher une deuxième... Au fond, elle ne pouvait s'empêcher de se dire qu'elle aurait dû la tuer, ce fameux jour. Il n'était pas dans sa nature de ruminer ce genre de pensée, encore moins de les laisser s'imposer... mais Liv était un cas à part (elle avait tué Pietro, en même temps)... cette conversation le prouvait déjà bien assez.
« Et des informations tu auras » j’ajoute, mon sourire carnassier toujours présent sur mes lèvres. C’est tout ce qu’elle me demande et c’est ce que je vais lui fournir, après tout, je ne suis pas le genre à donner plus que ce qu’on me demande, plus que ce que je dois. Je suis égalitaire de cette façon, même dans la vengeance, je me venge juste assez pour me sentir remboursée. Parce que la vie prend beaucoup trop en général et que je n’ai juste pas envie d’ajouter à ce déséquilibre. Il y a suffisamment d’inégalités injustes dans la vie pour que je décide moi aussi d’ajouter à ce merdier. Il ne faut pas se méprendre, ce n’est pas pour autant que je vais me transformer en Superman, loin de là.
Et l’affaire avec Wanda semble être close, nous nous sommes mises d’accord, le marché est conclus et il n’y a pas de confusion. Chacune semble avoir obtenu ce qu’elle souhaite, même si le service qu’il me reste à lui demander m’est encore inconnu. Les deux partis semblent satisfaits et sur la même longueur d’onde, alors je n’ai plus rien à faire ici. Je n’avais pas prévu de rester à la base, de toute manière, c’est par pure curiosité que je suis restée pour me taper la discute avec Wanda, et aussi pour la faire chier, cela dit. Mais maintenant que j’ai eu mon compte d’amusement et tellement plus, il est temps que je rentre.
Je me tourne donc vers la sortie et m’y dirige à pas lents avant de lancer une dernière phrase en direction de Wanda « Je te contacterai lorsque j’aurai trouvé quelque chose. » Cela pourrait prendre des jours, voir des semaines, puisque j’ai un travail à côté, il ne faut pas l’oublier et que je ne peux juste pas me permettre de soudain faire des recherches sur un autre officier de l’ordre, même issu d’une autre organisation que la mienne. Il va falloir que je me la joue fine sur ce coup-là et que je mette en place une stratégie me permettant aussi d’assurer mes arrières. Car si cela ne me dérange pas du tout de foutre la merde et de causer la pagaille, même au sein de la police et du FBI, je ne tiens pas à y laisser ma peau. Des plumes, peut-être, rien qui ne pourras pas repousser avec le temps, mais je ne vais pas mourir pour les idées d’une gamine mutante qui a une dent contre plus sadique qu’elle.
Mais ce sera drôle quand même, de les regarder se prendre le bec.