Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
Tuer était appréciable, tuer était agréable, c’était une bonne manière de régler son compte à une personne qui gâchait le paysage. Cependant, il y avait énormément de moyen de nuire à une personne, sans pour autant passer à un cas extrême comme ce dernier. Même si Alex devait bien avouer qu’elle ne pouvait pas s’empêcher d’avoir envie d’avoir du sang sur les mains, surtout des personnes qu’elle ne pouvait pas supporter. Sauf qu’elle ne décidait pas toujours de la manière de procéder, du moins elle se retrouvait confrontée à des limites. Les hauts dirigeants de l’Hydra lui avaient demandé d’effectuer une mission particulière, de nuire à une personne sans passer par le meurtre. Parce que cette personne était malheureusement très utile pour l’organisation, du moins, pour le moment. C’était un scientifique qui enseignait dans une université de New-York en parallèle de ses expériences un peu… douteuse. Evidemment, personne n’était au courant de ce qu’il faisait en dehors de ses cours, personne sauf les membres de l’Hydra bien sûr. Ces derniers avaient besoin de ses recherches, mais il ne cédait pas eux menaces. L’homme n’avait aucune famille sur qui les menaces pouvaient bien tomber, il n’y avait que son travail de professeur qui comptait. Et comme ils ne pouvaient pas le tuer, sans avoir eu les recherches, ils devaient trouver un autre moyen. Alex était parfaite pour ce rôle, elle avait su immédiatement comment s’y prendre.
Elle avait commencé par s’inscrire aux cours de ce professeur, avant de le séduire comme elle savait si bien le faire. Malgré son statut d’étudiante, l’homme n’avait évidemment pas été capable de résister à son charme. Ils avaient passé une soirée merveilleuse à ensemble, passant également un très bon moment au lit. Alex dut bien avouer que son partenaire ne fut pas si désagréable que cela, mais l’idée de le piéger était sans doute ce qui l’avait le plus amusé. Après cette nuit torride, elle s’était simplement arrangée pour que son corps porte la marque de violence. Quelques preuves supplémentaires et elle n’avait plus eu qu’à se rendre au commissariat pour porter plainte, avec une fausse identité. Elle l’avait fait, des relevées avaient été effectuées sur son corps, toutes les preuves étaient contre le charmant professeur. On ne pouvait pas du tout douter de la pauvre jeune femme meurtrie qui avait été violenté. Cet homme risquait de passer un moment en prison, il n’allait pas avoir d’autre choix que d’accepter la proposition de l’Hydra pour s’en sortir. C’était donc ainsi que la mutante s’était retrouvée au commissariat, dans une pièce isolée, jouant parfaitement son rôle de jeune femme traumatisée. On lui avait dit qu’elle pourrait rentrer chez elle après une confrontation avec l’homme qui l’avait « violé », elle n’avait aucun souci à attendre. Même si évidemment, par souci de cohérence, elle avait affirmé ne pas vouloir revoir cet horrible homme. Elle attendait donc patiemment, seule dans une pièce. Et quand la porte s’ouvrit, elle fut surprise de poser ses yeux sur celle qu’elle attendait le moins.
« Raven. » Alex sourit, comme elle ne l’avait pas fait depuis qu’elle se trouvait ici. Evidemment, elle savait parfaitement qu’il n’y avait aucune caméra et aucune vitre teinté dans le coin, elle pouvait se permettre de montrer son vrai visage. « Quelle plaisir de te voir. »
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
C'
était somme toute une affaire parfaitement banale. Comme on en croisait tous les jours au commissariat, et que l'on expédiait comme un rien, et en se souciant peu de l'état de détresse sous-jacente de la personne que l'on interrogeait (du moins dans le cas de Liv, qui se pensait incapable d'émotions et de sentiments, c'était le cas). Liv se serait vraiment pas épargnée un tel cas de figure, elle aurait de loin préféré à des affaires plus sordides et donc plus intéressantes. Écouter les jérémiades d'une femme violée n'avait rien de palpitant, et cela la freinait sur des affaires qui l'intéressaient bien plus. Mais soit, son supérieur lui avait demandé de gérer la nouvelle venue, et Liv obéissait (presque) toujours aux ordres de ses supérieurs. Ce n'était pas toujours de gaieté de coeur, mais la discipline était l'une des clés de son code personnel, et c'était un code qu'elle prenait grand soin de respecter à la lettre, ce depuis un moment, déjà, bien consciente qu'elle avait la nécessité de ces règles et de ces barrières si elle voulait s'éviter le même sort que celui qu'elle réservait pour sa part à ceux sur qui elle enquêtait. Peut-être finirait-elle par ne plus avoir le choix et serait-elle considérée comme la criminelle qu'elle était réellement, mais pour l'heure, personne ne la soupçonnait, et elle avait la ferme intention que cela dure, encore et encore. Bref, forte de ces considérations, elle se rendit donc dans la pièce isolée, pour trouver la victime éplorée dont elle allait devoir entendre les complaintes. C'était ce qu'elle avait cru, du moins. Avant de découvrir à qui elle avait en fait affaire. Et cela changeait tout. Manifestement, l'affaire était plus croustillante qu'il n'y paraissait, et cela changeait agréablement la donne pour Liv, même si cette-dernière n'aimait pas particulièrement quand la distinction entre Liv et Raven disparaissait, et que les deux se mêlaient. C'était arrivé récemment avec Pietro, cela arrivait de nouveau. Mais cette fois, aucune surprise pour Alex, elle était, avec Magnéto (et Pietro, dorénavant), la seule à connaître sa double identité. Elle n'afficha pas l'ombre d'un sourire, mais on pouvait tout de même reconnaître légèrement plus de chaleur dans son attitude qu'elle n'en accordait d'habitude à son entourage.
-Que viens-tu faire ici ?
Connaissant parfaitement la personnalité d'Alex (même si elle ne pouvait pas prétendre tout savoir), il ne faisait aucun doute pour elle que la mutante, si elle devait effectivement être là pour se plaindre d'avoir été violentée, était à placer davantage du côté de l'oppresseur que de l'oppressé, et Raven était curieuse de savoir quelles circonstances avaient pu la mener jusqu'ici. Elles pouvaient parler librement. La pièce était suffisamment insonorisée (il fallait juste s'éviter l'entrée impromptue de l'un de ses collègues, mais cela arrivait très rarement) et aucune caméra n'était installée dans cette pièce. Inutile, donc, de garder leurs masques, et c'était tant mieux (de manière générale, Liv se sentait mieux en tant que Raven, même si l'affaire était forcément plus délicate quand elle se trouvait sur son lieu de travail, et au milieu de tous ces collègues qui - fort heureusement - n'avaient pas la moindre idée de ce qu'était sa véritable nature) ainsi, car Liv voulait véritablement en apprendre davantage.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
Alex était surprise de tomber sur Raven, mais c’était vraiment une agréable surprise. La jeune femme ne s’attendait pas à tomber sur la mutante – même si elle connaissait sa double identité, ainsi que Liv connaissait ses doubles vies également – mais elle appréciait vraiment ça. Parce que s’il y avait bien une personne que la mutante appréciait de croiser, c’était Raven. La jeune femme savait parfaitement qu’elle n’avait pas besoin de jouer la comédie, elle pouvait obtenir le soutien de la criminologue sans devoir lui faire gober un mensonge. Même si c’était la spécialité d’Alex de faire croire à des mensonges, elle n’avait eu aucun doute dans sa capacité à faire croire à son histoire. La mutante avait tout mis en place pour que cela ne laisse pas le moindre doute, il y avait donc peu de chance qu’elle ait échoué. Sauf qu’elle trouvait cela bien mieux encore d’y parvenir avec sa consœur. Le sourire de la jeune femme augmenta quand Raven lui demanda ce qu’elle faisait ici. Son ton pouvait sembler sec et froid, mais la jeune femme la connaissait assez pour voir cette légère chaleur supplémentaire qu’il y avait dans son attitude quand elle s’adressait à elle. Raven était le genre de femme particulière, qui avait une façon d’être ne ressemblant à personne d’autre et c’était justement ce qu’Alex adorait chez elle. Raven était une personne bien à part.
« Je suis venue porter plainte. » Dit-elle en perdant son sourire, soupirant longuement. « J’ai été agressée par un vilain monsieur, il m’a fait énormément de mal. »
Elle afficha une mine faussement triste, forçant un peu sur la mauvaise comédie sachant parfaitement que dans tous les cas, Raven ne pouvait pas croire une seule seconde qu’on ait pu abuser d’elle. Même si quelqu’un en avait l’idée, Alex ne le laisserait pas du tout faire. Elle était suffisamment forte pour se défendre et le jour où un homme s’imaginerait d’avoir le dessus sur elle, il s’en mordrait les doigts. Elle acceptait de se faire passer pour une victime, que pour la bonne cause. Elle avait besoin de ce moyen de pression. Et il était évident que Raven voudrait les détails, des détails que la jeune femme avait bien envie de lui raconter (parce qu’au fond, elle était quand même un petit peu fière d’elle).
« Je dois trouver un moyen de pression sur un… charmant scientifique. Quel meilleur moyen que de ruiner sa carrière avec une histoire aussi glauque que le viol d’une pauvre jeune femme sans défense. »
Quand elle prononça les derniers mots, Alex ne put s’empêcher de forcer un peu encore une fois sur le ton de sa voix. Elle savait parfaitement que personne ne pouvait les entendre dans cette pièce, alors autant qu’elle en profite. Elle aurait largement l’occasion de jouer la comédie plus tard, quand elle devrait comparaitre vraiment afin de porter plainte contre l’homme. Elle sourit, l’idée de savoir ce dernier incapable de faire autrement que d’accepter les accords de l’Hydra l’amusait grandement.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
L
iv ne connaissait pas meilleure comédienne qu'Alex. Liv faisait bien des efforts pour ressembler à n'importe quel être humain, elle faisait au mieux pour feindre ces émotions qu'elle ne ressentait pas, et on se prenait suffisamment au jeu pour imaginer qu'elle était humaine, comme tout le monde, comme si le monstre n'existait pas, mais elle passait malgré tout pour quelqu'un de plutôt froid et distant, quand son interlocutrice avait l'aptitude de déclencher des émotions plus forte, et d'en feindre d'autre. Qui n'aurait pas pitié de cette pauvre victime éplorée qui avait été victime de l'acte le plus odieux qu'un être humain puisse commettre ? Personne, à moins, comme Liv, de ne rien ressentir du tout quoi qu'il en soit (ou presque rien, car quelques émotions avaient tendance à la trahir, dernièrement), ou tout simplement d'avoir conscience de la supercherie. Bien sûr, Alex ne parlait qu'à demi-mot, mais la jeune femme n'avait pas besoin d'avoir le détail de l'affaire (même si sa curiosité la poussait à en savoir davantage) pour savoir de quoi il retournait très exactement. Du présumé violeur et de la femme qu'elle avait en face d'elle, elle n'avait pas à se demander bien longtemps (ou tout court) qui des deux était véritablement la victime. La stratégie d'Alex était bonne, en tous cas, et elle serait à tous les coups payantes. Elle l'aurait été quel que soit le représentant de l'ordre face auquel elle se serait trouvé, mais là, elle avait la pleine assurance que Liv ne saurait jamais qu'abonder dans son sens.
-On ne peut pas laisser un tel crime impuni. répondit Liv d'un ton de connivence. Je ferai le nécessaire pour que cet homme soit jugé à la hauteur de ses actes.
Elle adressa un regard entendu à Alex. Cette affaire-ci était réglé. Elle n'aurait pas eu à s'en faire de toute manière, mais au moins, elle n'aurait pas à jouer les pauvres femmes en détresse plus longtemps. Si elle savait tenir à merveille ce rôle quand il le fallait, Liv la préférait largement au naturel. Et au naturel, il est certain qu'Alex était tout sauf une chouineuse. Et ainsi, ils pouvaient rentrer dans le vif du sujet, car Liv était vraiment très curieuse de savoir qui était ce scientifique et pourquoi il était nécessaire de faire pression sur lui.
-Je serais curieuse d'en apprendre davantage sur ce scientifique.
Oui, vraiment curieuse. Ce n'était bien sûr pas pour elle une nécessité absolue de savoir, mais Liv supportait mal de s'interroger et, dans la foulée, de ne pas obtenir la réponse à ses questions. Elle avait ce besoin infini et manifeste de savoir, contre lequel elle ne pouvait tout simplement pas lutter, ni plus ni moins. Et puisqu'elle était convaincue qu'Alex serait de toute manière ravie de lui en dire plus, elle ne manquait pas de poser ces questions de façon directe. Elles avaient du temps devant elles, de toute façon.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
Alex savait parfaitement qu'elle n'avait pas besoin de jouer la comédie auprès de Liv, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de le faire quand même. C'était comme cela, elle se sentait mine de rien assez fière de ce qu'elle était en train de faire. Evidemment, elle savait aussi que cette affaire n'allait qu'abonder en son sens, puisqu'elle avait en face d'elle son atout le plus précieux. Elle n'aurait pas pu espérer tomber sur meilleurs personnes pour s'occuper de son cas. Même si, dans cette affaire, Alex ne travaillait pas pour les intérêts de Magnéto et de la confrérie, cela ne changeait en rien le fait qu'elle puisse espérer obtenir son aide. Après tout, tout ce qui servait les intérêts de la mutante avait un impact sur ceux de Magnéto, parce qu'elle était son infiltrée dans l'Hydra. L'organisation secrète (plus soit disant morte que secrète en fait) devait avoir plus que confiance en Alex pour permettre au mutant de la contrôler à un moment donné. C'était le but de tout cela et la jeune femme n'avait pas l'intention de faillir à sa tâche. Le sourire d'Alex apparu sur son visage quand Liv affirma qu'elle ferait le nécessaire pour que cet homme soit jugé pour ce qu'il avait fait (ce qu'il n'avait pas vraiment fait, mais sa parole ne compterait pas, surtout avec Liv dans l'équation). Elle était satisfaite, vraiment, de la tournure des évènements. Les choses n'auraient pas pu se dérouler aussi bien que maintenant. Elle ne répondit pas à la première remarque de sa camarade, se contentant simplement de sourire et d'arrêter de jouer les victimes éplorée. Et Liv semblait maintenant, très curieuse d'en savoir plus sur le scientifique en question.
« Eh ben. » Commença-t-elle en se mettant plus à l'aise sur la chaise, appuyant son dos contre le dossier et croisant les jambes. Si elle avait pu, elle se serait bien allumé une cigarette en cet instant précis. « A première vue, il semble être un professeur d'université tout ce qu'il y a de plus classique. » Mais évidemment, il y avait autre chose en dessous sinon il n'intéresserait pas l'Hydra et Alex ne se serait pas donné à ce point du mal pour le faire tomber. « Mais en dehors de ses activités scolaires, cet homme fait des recherches que l'Hydra bien l'intention de s'emparer. Evidemment, il n'a pas accepté, sinon je n'aurais pas eu besoin de briser sa vie de cette manière. » L'Hydra aurait très bien pu le tuer, mais ils n'auraient pas eu les résultats de ses recherches. De cette manière, ils espéraient lui mettre suffisamment de pression pour qu'il cède. Et si jamais ils ne devaient pas le faire, ils se seraient vengés correctement, puisque l'homme finirait sans doute sa vie en prison. « Il fait des recherches sur la mutation. »
Précisa finalement Alex, pour terminer son petit récit. Elle se doutait que la jeune femme en face d'elle serait intéressée par cette information également, puisqu'indirectement cela la concernait. Est-ce que les recherches de l'homme étaient vraiment importantes ? En réalité, la mutante ne le savait pas vraiment, mais elle se mettait à fond dans cette mission dans le but d'obtenir ces résultats. L'Hydra les voulait pour grandir encore, pour devenir bien plus forte, mais Alex avait un tout autre objectif dans l'histoire finalement. Soit celui de les détruire afin de préserver les mutants - qui passaient toujours en premier à ses yeux - soit de les utiliser pour leur propre cause. Elle verrait le jour où elle pourrait les observer.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
L
a criminologue écouta avec la plus grandes des attentions les informations complémentaires que son interlocutrice lui donna au scientifique qui l'avait soi-disant violentée (ce au sujet de quoi ni l'une ni l'autre ne pouvaient être dupes, cela va sans dire). Il s'agissait donc d'un professeur d'université apparemment sans histoire, mais qui ne se contentait pas des quelques cours donnés à ses élèves, sans quoi il est certain qu'il n'aurait pas le moins du monde intéressé l'Hydra. L'homme faisait des recherches à ses heures perdues, des recherches sur les mutations. Liv fronça légèrement les sourcils. Bien évidemment, cette information était loin de la laisser indifférente, parce que sa curiosité naturelle parlait pour elle, d'une part, mais tout autant parce qu'elle se demandait tout de même ce que pouvait être la nature exacte de ces recherches. En tant que mutante elle-même, l'information ne pouvait évidemment pas la laisser indifférente. Elle comptait bien en apprendre davantage, et pensait être en droit de savoir plus d'informations, même si elles ne concernaient pas directement la Confrérie des mutants, mais l'Hydra, pour laquelle Alex travaillait en tant qu'infiltrée, et une infiltrée de talent, qui plus est, car elle avait réellement su se faire sa place parmi le reste de l'organisation, et nul ne soupçonnait sa double allégeance.
-L'inculper pour viol sera chose facile. répondit dans un premier temps Liv, comme à son habitude très professionnelle, froide et pragmatique. Pour un chef d'inculpation de cet acabit, on va tirer jusqu'à quinze ans de prison ferme... Elle marqua une légère pause. Mais il existe toujours une manière ou une autre d'alourdir un peu la sentence en question.
Tout dépendait de la punition qui devait incomber au scientifique, et de la pression qui se devait d'être exercée sur lui, sachant que quoi qu'il en soit, sa carrière était complètement ruinée. Nul employeur n'irait accorder sa confiance à un homme possédant un tel casier judiciaire. Liv faisait toujours très proprement son travail, mais si elle se voyait contrainte de couvrir un crime, elle s'arrangeait pour le faire tout aussi proprement. C'est pour cette raison qu'elle ne manquait pas de sonder les attentes de son interlocutrice, et donc, par voie de conséquences, celles de l'Hydra.
-Ces expériences, de quel ordre étaient-elles ?
Les mutations étaient un domaine qui, très logiquement, fascinait bon nombre de scientifiques. Depuis que l'existence des mutants avait été révélé, elle invitait tout féru de sciences à reconsidérer les fondements même de la génétique, et ce ne pouvait être que le berceau de recherche fascinante pour quiconque s'avérait un tant soit peu curieux ou passionné, Liv n'en doutait pas un seul instant. Des expériences sur les mutations, il pouvait en exister des centaines, et pour cause, il fallait tenir compte de toutes les formes de mutation existantes, et en plus d'être légions, elles n'étaient en rien répertoriées (du moins pour le moment).
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
Alex avait une bonne place dans l’organisation Hydra, mais la jeune femme était persuadée que si on lui avait confié cette mission spécifiquement, c’était parce que les expériences de cet homme touchaient à la mutation. Les hauts rangs de l’organisation savaient parfaitement que la mutante avait de l’intérêt dans tout ce qui touchait ce domaine. Ils ne se doutaient pas pour autant qu’elle avait l’intention de faire passer la confrérie avant l’Hydra. En tout cas, cette information ne manqua pas de titiller la curiosité de la criminologue qu’Alex avait sous les yeux. Elle le vit au moment où elle leva ses sourcils, apprenant que l’homme travaillait sur la mutation. Mais en bonne professionnelle qu’elle était, Liv prit quand même le temps de mentionner le sort qui était réservé à cet homme s’il était inculpé de viol. Pour un acte de ce genre, cela pouvait aller jusqu’à quinze ans de prison. Alex n’avait vraiment pas de compassion d’une manière générale, mais elle trouvait quand même la peine particulièrement légère pour un crime de ce genre. Même si c’était suffisant dans son cas, puisqu’il n’y avait pas eu de viol du tout. Quinze ans de prison, une réputation ruiné, un travail hors de portée, c’était cher payé pour cacher des recherches. L’homme avait de forte chance de craquer, mais en même temps, elle voulait s’arranger du bon déroulement de son plan.
« Et si je veux alourdir la peine, qu’est-ce que je dois faire exactement ? »
Puisque Liv mentionnait la possibilité de faire en sorte qu’il paie encore plus les conséquences d’un acte qu’il n’avait pas commis, Alex n’allait pas passer à côté de cette information. Elle voulait mettre le plus de pression possible sur le dos du professeur, afin qu’il donne ses informations à l’Hydra. Il n’allait pas avoir beaucoup de choix de toute façon, plus personne ne voudrait travailler avec lui maintenant. L’Hydra était sa meilleure solution, même si sa vie entière était brisée quand même. Cela lui apprendra à tenir tête à une organisation de cette envergure.
« Je ne sais pas exactement, en dehors que ça touche directement notre gêne et que l’Hydra souhaite obtenir les résultats de ces recherches avant le gouvernement. » Donc, si ça intéressait le gouvernement, ça ne pouvait qu’être quelque chose d’important. Et si c’était quelque chose d’important, les mutants – Magnéto donc – devaient en avoir connaissance. « Tu comprends donc que j’ai vraiment besoin d’avoir accès à ces informations. »
Elle avait besoin oui, afin de prendre une décision sur la manière de faire. Il était évident qu’elle pourrait difficilement faire autre chose que donner les résultats à l’Hydra, mais elle pourrait informer la confrérie de ces recherches quand même. C’était une manière pour eux d’avoir un temps d’avance sur tout le reste. Si le gouvernement avait envie de les avoir aussi, c’était forcément quelque chose d’important. Soit pour accroitre le pouvoir des mutants – l’Hydra avait besoin de membre aux pouvoirs particuliers – ou alors le contraire, une manière de briser cette mutation.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
A
lex n'avait que peu d'informations au sujet de ce scientifique bientôt inculpé de viol et de ses recherches, mais il était néanmoins évident qu'elles ne pouvaient pas le moins du monde être prises à la légère. S'il s'agissait de recherche sur le gène mutant destinées à être transmises au gouvernement, il y avait forcément de quoi s'alarmer et se sentir concerné. Liv ne manquait pas de l'être, en tous cas, et elle ne comprenait que mieux pourquoi cet homme devait être réduit au silence, et en passer de fait par la méthode la plus dissuasive possible. Quinze ans de prison, cela avait de quoi calmer n'importe quel homme et l'inviter pour de bon à renoncer à son travail pour transmettre les données récoltées à ceux qui le menaçaient, mais une sentence plus lourde pourrait peut-être en effet faciliter la tâche. Tout dépendait de la nature exacte de ces recherches, et de ce qu'elles représentaient pour cet homme, du temps qu'il y avait consacré. Autant se montrer incisif, dans tous les cas, ne serait-ce qu'en guise de précaution et Liv comptait bien aider son interlocutrice à parvenir à ses fins.
-Je comprends, oui. approuva-t-elle, qui n'avait effectivement pas besoin d'en savoir davantage pour comprendre l'urgence et l'intérêt de la situation, il était de toute évidence nécessaire d'agir, et d'agir bien. Du moins dans les intérêts d'Alex et non de cet homme pour lequel Liv ne cultivait pas l'ombre d'une estime, mais qui ne mériterait certainement pas le châtiment qu'un juge finirait par ordonner en sa défaveur, pour peu qu'elle y mettent les moyens. Pour alourdir la peine, il faut prendre en compte les séquelles... physiques, psychologiques de la victime, l'incidence que le crime aura eu sur la vie de la victime. Et les circonstances du crime, également. Un viol restait un viol, et c'était forcément atroce, mais ajoutez-y un soupçon de torture physique et morale, une arme pointée sur la victime, cela devenait un viol aggravé, et cette charmante appellation ne serait sans doute pas pour déplaire à Alex. En cas de viol aggravé, sa peine peut être alourdie de cinq ans, dix dans certains cas exceptionnels. Elle planta son regard dans celui de son interlocutrice. Pour cela, il suffit d'inventer une histoire bien cruelle et de disséminer quelques preuves ici et là. Je suis convaincue que c'est entièrement dans tes cordes.
Pour ce qui était de faire preuve d'inventivité et de machiavélisme, il était en effet certain que la jeune femme n'était pas en reste. Preuve en était, d'ailleurs, du plan qu'elle avait commencé à mettre en place en se faisant passer pour une victime éplorée qui souffrait encore de l'agression dont elle avait été victime il y a peu. Seule et face à n'importe quel interlocuteur, Liv était certaine qu'elle s'en sortirait très bien, mais puisqu'elle était dans la confidence, elle lui confiait la certitude que les tenants et aboutissants de cette affaire seraient biaisés pour que le tout joue en sa faveur. Elle obtiendrait gain de cause, Liv y veillerait.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
C'était dans l'intérêt de tout le monde que cet homme prenne le plus d'année possible de prison, qu'il soit le plus menacé. Celui d'Alex qui devait remplir une mission pour l'Hydra et qui ne devait donc pas échouer (même les meilleurs éléments, s'ils échouent, son réduit au silence par les grandes têtes de l'Hydra, pour le simple fait de leur incompétence), mais aussi pour les mutants. Parce qu'il était évident que la jeune femme allait faire en sorte de récupérer ses informations et les transmettre à la confrérie des mauvais mutants. S'il y avait des expériences sur le gène des mutants, cela les concernait forcément. Qui sait, peut-être que ce scientifique à enlever des mutants pour leur faire des tests ? Peut-être que l'homme a trouvé un moyen de découpler, ou l'inverse, les pouvoirs des mutants ? Peut-être tout simplement ces informations pouvaient signer leurs pertes si jamais cela tombait entre de mauvaises mains. Et Alex considérait que celles du gouvernement ou de l'Hydra étaient mauvaises. La jeune femme ne pouvait pas tout rejetait de ce qui venait de l'organisation pour laquelle elle travaillait (officiellement du moins), il y avait des idées qu'elle adoptait et elle aimait leurs méthodes, mais elle ne pouvait pas faire passer l'organisation avant les mutants. Magnéto, la confrérie des mauvais mutants et même plus généralement tous les mutants, passaient forcément avant tout le reste pour la jeune femme. Si l'Hydra était un moyen pour les mutants de parvenir à la destruction de l'humanité - puisqu'ils ne méritaient vraiment pas mieux - alors elle allait s'en servir. Et en attendant, elle se contentait surtout de protéger ses confrères contre eux.
Par chance, Alex pouvait entièrement compter sur Liv pour l'aider. La jeune femme voyait complètement où elle voulait en venir et il était évident qu'elles avaient le même intérêt. Le corbeau ne devait pas avoir spécialement envie que des recherches de ce type arrivent aux oreilles du gouvernement. Ce scientifique devait donc risquer le pire pour qu'il transmette les résultats à l'Hydra, afin que la jeune femme qui faisait croire à son viol puisse les utiliser à son tour. Alex se doutait bien que le viol était une bonne solution - raison pour laquelle elle avait fait en sorte que cette histoire soit crédible - mais elle avait besoin de la criminologue pour les détails techniques. Raven savait parfaitement ce qui était bon de faire pour que le scientifique risque le plus gros. Ce n'était pas utile de se contenter d'un simple viol, il fallait que ça soit un viol aggravé. S'il y avait de la cruauté en plus de cette pulsion violente, la sentence pourrait être bien plus grave. Un fin sourire vint se dessiner sur le visage de la mutante au fur et à mesure que sa camarade lui exposait les faits. Elle pensait pouvoir y arriver.
« Donc il faut que je fasse en sorte que ce scientifique passe pour un psychopathe en puissance ? » La jeune femme réfléchissait en même temps à ce qu'elle pouvait ajouter pour que son histoire soit bien pire encore que ce qu'elle était. Il était évident qu'elle allait devoir jouer les filles traumatisées. « Ça ne devrait pas être trop compliqué de faire croire qu'il a détruit ma vie. » Alex allait de toute façon tout faire pour que cette affaire tourne à son avantage. « Je présume qu'on peut rendre ça pire encore s'il y a plusieurs victimes ? »
S'il n'était pas à son coup d'essai, il prendrait plus encore sans doute. Si Alex avait été capable de faire preuve de compassion, elle aurait presque eu de la peine pour ce pauvre scientifique.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
I
l est certain que la conversation que la jeune femme échangeait présentement avec Alex n'avait rien de déontologique ou d'acceptable d'un strict point de vue professionnel. Liv, qui était normalement très à cheval sur le protocole, faisait ici une grande entorse à ses propres règles, mais la situation méritait bien ce genre d'écart, puisqu'il était question d'Alex d'une part, et puisque le sujet qu'elles abordaient l'une et l'autre dans le plus grand calme la concernait forcément en tant que mutante. Liv ne plaçait que rarement des innocents derrière les barreaux. Mais si cela devait arriver, c'était toujours stratégique, et en son âme et conscience. Si l'homme n'avait, d'un point de vue strictement légal, rien fait de répréhensible, il méritait malgré tout, et pour d'autres raisons, de subir une sentence aussi terrible que possible, et pour cela, il fallait compter sur les connaissances juridiques de la criminologue et sur le machiavélisme d'Alex. Et sur leur absence totale de compassion à l'une comme à l'autre. Liv hocha doucement la tête quand son interlocutrice lui demanda de confirmer que le meilleur moyen de faire payer le scientifique était de le faire passer pour un psychopathe certain (d'un autre côté, tous les violeurs en était, mais les circonstances aggravantes ne pouvaient effectivement qu'alourdir sa peine). Alex avait des ressources, Liv n'était pas vraiment surprise de l'entendre affirmer qu'elle saurait parfaitement prétendre qu'il avait complètement détruit sa vie. Elle saurait d'autant plus assurer sa crédibilité que son audience ne résisterait sans doute pas à ses redoutables talents de comédienne, doublés de ce charme certain que n'auraient pas su ternir quelques larmes de crocodile, bien au contraire. Alex, qui ne manquait pas plus d'imaginations que de ressources, assuma au passage que trouver à sa victime (dont elle se faisait passer pour la victime) d'autres victimes lui serait fatal. Elle avait effectivement raison.
-En effet. confirma Liv dans un nouvel hochement de tête. En cas d'antécédents, sa peine pourrait bien se voir prolonger ad vitam. Il ne reverra pas de sitôt la lumière du jour.
Oui, elle s'exprimait au futur plutôt qu'au conditionnel. Elle connaissait suffisamment Alex, à présent, pour être convaincue qu'elle n'émettrait pas cette hypothèse si ce n'est dans le but de l'exploiter. Après tout, elle devrait ne pas avoir trop de difficulté à trouver d'autres jeunes femmes pour prétendre avoir subi le même traitement violent qu'elle. Alex savait se montrer persuasive, et n'importe quel mutant un tant soit peu concerné par le sort de son "espèce" ne saurait ignorer la situation. Il était si simple d'y participer. Il suffisait de savoir jouer un peu la comédie, rien de bien sorcier. C'est certain, l'homme était fini. Rien ne le sauverait. Et Liv aurait son rôle à jouer dans cet affaire. Pour une fois, pour cette fois, contrevenir à ses principes était bien loin de lui provoquer quelque état d'âme que ce puisse être.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
En soit, Alex n’avait pas vraiment besoin de Liv pour comprendre que si elle parvenait – et ça allait être le cas – à trouver d’autres victimes à l’homme qui était vraiment la victime de cette histoire, son cas serait bien plus grave. Mais la jeune femme appréciait de voir la criminologue confirmer ses propos et affirmer que le professeur ne risquait pas de voir la lumière du jour avant un moment si cette situation se présentait. Autant dire que ça allait être vraiment le cas. Si Alex n’avait aucun doute sur sa capacité à jouer les pauvres victimes abattue par les actes horribles qu’avaient soit disant commis ce scientifique, elle savait aussi qu’elle n’aurait pas de mal à trouver d’autres victimes. Parce qu’il suffisait simplement de trouver les bonnes personnes. Au vu de la situation, il fallait se concentrer sur des mutantes qui n’avaient pas non plus envie de voir ce genre de recherches tomber entre les mains du gouvernement, des mutantes travaillant pour Magnéto par exemple. Même sans mutant, Alex savait qu’elle pouvait trouver un moyen de faire plonger cet homme. Une jeune femme pauvre aillant besoin d’argent – de beaucoup d’argent – pour vivre, pour sortir une misère qu’elle connaissait depuis trop longtemps. Une femme au passé trouble ne voulant pas voir ses mauvais actes revenir sur le devant de la scène et gâcher la petite vie qu’elle avait réussi à se construire. Ou tout simplement une femme aillant envie de s’amuser un peu. Alex n’avait aucun doute concernant sa capacité à trouver ces actrices qui allaient lui permettre de faire plonger ce professeur. Et si jamais l’instruction n’arrivait pas au bout, ce n’était pas un souci. Alex avait simplement besoin de mettre suffisamment la pression sur cet homme pour qu’il lui donne le résultat de ses recherches, ensuite il ne lui serait plus d’aucune utilité. Et elle perdrait sans doute l’envie de lui faire plus de mal encore.
« Parfait ! » Affirma la jeune femme d’un ton qu’elle ne devrait normalement pas utiliser en de telle circonstance, mais puisqu’elles n’avaient pas besoin de jouer la comédie, Alex n’allait pas se retenir. Liv savait parfaitement qui elle était, elle aurait l’occasion de jouer les pauvres victimes plus tard, quand elle allait devoir convaincre d’autre personne que ce scientifique était un vrai malade mentale. Alors qu’il était sans doute bien plus sain d’esprit que les deux femmes se trouvant présentement dans cette pièce en plein complot. « Ca ne devrait pas être bien compliqué de trouver tout ça alors. » Alex disait ça, mais en réalité elle savait parfaitement qu’elle allait y parvenir. En grande partie parce qu’elle n’avait pas vraiment le choix en même temps. Elle ne pouvait pas perdre une occasion aussi belle d’avoir un moyen de pression contre ce scientifique. « J’ai eu beaucoup de chance de tomber sur toi on dirait bien. »
Alex ne s’était en effet pas attendu à croiser Raven et la conversation qu’elle aurait eu avec l’un de ses collègues aurait été beaucoup moins productive. La jeune mutante était bien contente de l’avoir croisé donc.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
L
a réaction d'Alex n'avait pas grand rapport avec celle que devrait avoir une victime encore traumatisée par les sévices que lui aurait fait subir un salaud de violeur, mais il est certain que ce n'était pas Liv qui allait lui en tenir rigueur. Elle savait pertinemment que, si Alex avait eu affaire à un interlocuteur différent, elle aurait su parfaitement jouer la comédie. Mais les faux-semblants n'étaient en l'occurrence pas le moins du monde de mise. L'une comme l'autre savaient pertinemment à quoi s'en tenir, et Liv devait bien reconnaître éprouver un certain et malin plaisir à jouer en-dehors des règles, contrairement à ses habitudes bien ancrées. Quand c'était pour la bonne cause, la perspective pouvait bien être aussi bénéfique que réjouissante. Oui, Liv voulait bien reconnaître que c'était une bonne chose que son interlocutrice soit tombée sur elle (en toute humilité - cette humilité qu'elle ne possédait donc pas), car quand bien même n'importe quel flic lambda serait tombé dans le panneau et aurait sans nul doute cédé à toutes les exigences de la jeune femme, elle n'aurait pas eu droit aux conseils éclairés que le corbeau (car il est certain que Raven était plus à l'œuvre que Liv en cet instant précis, en dépit de l'endroit où elle se trouvait) lui avait prodigué pour permettre d'alourdir la peine du scientifique que la mutante avait pour cible. Certes, il s'en serait tiré quoi qu'il en soit avec une punition des plus sévères, mais il n'y avait pas de mal à corser la chose, n'est-ce pas ? Si, il y avait bel et bien un mal, mais puisqu'il était réservé à un autre, pourquoi s'en faire le moindre souci ? Il n'y avait pas de raison de s'en alarmer.
-J'ose espérer que tu n'es pas venue précisément dans ce commissariat sans nourrir ne serait-ce qu'un peu l'espoir de me croiser. répondit-elle d'un ton si neutre qu'il y avait à s'interroger quant au fait qu'elle puisse (et sache) faire une boutade ou non. Peut-être parce qu'il y a un fond de vérité à toute boutade ou tout simplement parce que Liv avait oublié il y a bien longtemps d'être quelqu'un d'expressif. Allez, raconte-moi en détails ce que cet homme t'as fait et comment les choses se sont passés. dit-elle alors, évidemment consciente qu'il ne s'était rien passé du tout, mais de ce ton professionnel qui se voyait seulement trahi par le tutoiement que la jeune femme employait pour s'adresser à la mutante. Je vais prendre ta déposition.
Cette formalité leur permettrait de déterminer ensemble sur quels détails insister afin d'écharper un peu plus l'homme qui était devenu à abattre. Pas de chance pour lui, quand on se retrouver la proie des redoutables prédatrices que pouvaient être Liv et Alex, espérer s'en sortir indemne relevait de la pure et simple fiction.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
Le sourire qu’Alex afficha aux propos de la mutante trahissait clairement le ton normal de la conversation qu’elles devraient avoir logiquement dans cette pièce. La jeune femme devait bien avouer qu’elle était satisfaite de pouvoir se trouver en compagnie de Raven, qui était l’une des femmes qu’elle estimait le plus dans la confrérie des mauvais mutants. Alex n’était pas du genre à avoir des tas d’amis, même si considérer Raven comme une amie était peut-être un peu trop fort. La mutante était une femme bien particulière et il fallait savoir lire entre les lignes de ses propos. Comme maintenant, alors qu’elle s’adressait à Alex d’un ton particulièrement neutre. C’était à se demander si elle était capable de ressentir la moindre émotion et Alex pensait que non. Ce qui lui plaisait énormément chez sa camarade d’ailleurs et qui ne manquait pas d’en rajouter à son charme. Alex devait bien avouer que par moment, elle enviait même cette capacité à celle qui savait être une amante plus qu’agréable. Leur relation était un peu particulièrement donc, elles pouvaient être des amies sans pour autant avoir besoin l’une de l’autre. Elles étaient amantes, sans avoir la moindre émotion et se contentant aisément des sensations qu’elles savaient mutuellement se procurer. Et elles étaient collègues dans cette grande tornade qu’était la confrérie des mauvais mutants. Et dans tous les cas, Alex appréciait vraiment de pouvoir passer du temps avec Raven et qu’elle ne pouvait qu’apprécier sa présence.
« J’ai toujours de l’espoir de te croiser voyons. »
Répondit la jeune femme sans perdre de son sourire ou encore de son ton de voix léger. Mais maintenant, elles devaient quand même passer aux choses sérieuses. Si la conversation qu’elles avaient depuis le début était assez légère, elles avaient quand même des choses à régler. Autant qu’elles en profitent pour mettre au point toutes les deux les détails de cette affaire, pour que la criminologue puisse l’aider officiellement dans son histoire. Elle devait donc prendre sa déposition. Alex se concentra un peu plus, afin de prendre un peu plus la situation au sérieux.
« Je me suis rendu à quelques cours du professeur à l’université. » Commença-t-elle d’un ton sérieux, même si elle n’avait pas forcément besoin de l’être en face de Raven, qui savait parfaitement que rien de tout cela n’était vrai. « Comme je ne comprenais pas bien ses derniers cours, il m’a proposé de se voir en dehors de l’université pour me donner des cours particuliers. Alors, je me suis rendu chez lui, sans... imaginer une seule seconde ce qu’il allait me faire. » Mais bien sûr. « Au début, il était vraiment sympa. Très gentil, très galant et puis, il a eu des gestes un peu… déplacé. » Alex marqua une pause, ses lèvres s’étirèrent un instant en un fin sourire qui trahissait ses vraies pensées. « Quand j’ai gentiment décliné son… invitation, il a commencé à m’insulter à me frapper. Avant de… »
Il y avait tout, un début de larmes dans ses yeux, sa voix qui tremble. Elle n’avait pas besoin de jouer la comédie, mais c’était amusant.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
F
aire mine d'éprouver des sentiments que l'on ne ressent pas, c'était un travail de tous les instants auquel Liv s'appliquait autant que possible. Malheureusement, en dépit de toute la volonté qu'elle mettait à l'exercice, si elle savait être efficace en certaines circonstances, il restait des émotions qu'elle ne savait pas vraiment convenablement feindre. Difficile de prétendre ressentir quelque chose quand cela n'a jamais été le cas, quand on ignore même ce que le fait de ressentir quoi que ce soit peut représenter (même si, à la vérité, la criminologue se découvrait dernièrement une capacité à ressentir les choses qu'elle se serait bien épargnée, et qui ne lui était pas agréable le moins du monde). Alex, elle, avait un talent certain pour cette petite, comédie, un talent qui semblait tout naturel, même. Et il ne faisait nul doute que Liv le lui enviait. Il lui serait bien utile à certains moments. Si elle n'avait pas été au fait du caractère d'Alex, si elle avait dû prendre sa déposition sans rien savoir d'elle et sans savoir quelle manipulatrice et actrice se tenait face à elle, il ne faisait aucun doute qu'elle se serait laissée berner (et pourtant, elle se pensait relativement douée pour dénicher les menteurs et les criminels - et pour cause, ce faisait partie intégrante de son travail, qu'elle considérait faire à la perfection, quand elle ne s'autorisait pas certaines entorses au règlement). Elle aurait complètement avalé son histoire, et cela aurait été à elle de jouer la comédie en prétendant compatir. Ce qu'elle fit plus ou moins d'ailleurs, simplement pour se mettre sur un pied d'égalité auprès de celle qui faisait mine en cet instant d'être au bord des larmes.
-Je suis désolée de ce qui vous est arrivée... dit-elle de ce ton qu'elle employait en présence de victimes, d'habitude. Et généralement, ça prenait, les gens, pour se livrer et n'émettre aucun détail de ce qui leur arrivait (ou pour se trahir quand ils faisaient semblant), avaient besoin de se sentir en confiance. Là, bien sûr, ce n'était pas nécessaire, mais la comédie se poursuivait néanmoins. Y a-t-il un témoin ? Un élève qui pourra confirmer que vous assistiez bien à ces cours ?
Bien sûr, il ne pouvait pas y avoir de témoin puisque cette histoire était montée de toute pièce, si Liv posait cette question, c'était surtout pour inviter Alex à s'en trouver. Ce n'était pas la chose la plus difficile à faire en soi, un témoin, cela pouvait s'acheter et se corrompre facilement, mais même si Liv prenait la déposition de la jeune femme et acterait donc forcément en sa faveur, elle avait besoin d'éléments de preuve en béton armé pour que les soupçons ne finissent pas par peser sur elle. Normalement, cette affaire serait vite pliée et il n'y aurait pas la moindre retombée, mais il était dans la nature de Liv que d'être perfectionniste.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
Qu’est-ce qu’on ressentait quand on se faisait agresser ? Exactement ce qu’Alex laissait passer en cet instant devant Raven. Ce n’était pas vraiment difficile pour elle de faire croire à des sentiments qu’elle ne ressentait pas sur le moment présent. Parce qu’il suffisait simplement qu’elle pense à ce qu’elle avait pu subir dans le passé pour savoir exactement comment réagir en cet instant. Elle n’avait évidemment pas besoin de jouer la comédie devant Raven, mais la mutante trouvait le jeu quelque peu amusant quand même. Sait-on jamais, un collègue de la jeune femme pouvait très bien entrer dans la pièce finalement et vouloir assister la mutante. Cela serait quand même dommage que ce qu’elles étaient en train de mettre en place ne marche pas parce qu’elles se seraient trahit. Alors oui, Alex décidait simplement de jouer la comédie parce que ça l’amusait et parce qu’il était quand même important qu’elles soient sérieuses dans ce qu’elles mettaient en place. Ce n’était pas rien après tout, Alex avait vraiment besoin de mettre la pression sur ce professeur. Ce qu’elle n’allait pas manquer de faire, parce que ça promettait vraiment tout ça. Et si Alex pensait être une très bonne comédienne, elle devait bien avouer que c’était aussi le cas de Raven. En même temps, la jeune femme ne doutait pas une seule seconde des talents de sa camarade. La jeune femme travaillait quand même au sein même de la police de New-York, en tant que criminologue, alors qu’elle était une terroriste pour le compte de la confrérie des mauvais mutants (et une meurtrière pour son propre compte aussi). C’était bien la preuve qu’elle était une comédienne hors pair. La jeune femme aurait donc pu clairement croire que Raven compatissait à son malheur, si elle ne savait pas que toute cette histoire n’était que mensonge et faux semblants.
Quand Raven parla de la possibilité qu’avait la jeune femme de demander à un élève de témoigner de sa présence lors des cours de ce professeur. En effet, maintenant qu’Alex y pensait, ça pouvait quand même être une très bonne chose que quelqu’un puisse témoigner de sa présence. Parce que l’homme allait forcément tenter de se défendre, affirmer qu’il ne la connaissait pas, qu’elle n’était jamais venu en cours. Il fallait bien éviter que le moindre doute ne s’installe dans cette histoire, que ce professeur passe tout de suite pour un grand pervers. En plus du fait qu’elle allait trouver d’ancienne fausse victime, Alex allait donc trouver des témoins.
« Bien sûr, plusieurs élèves pourront confirmer. »
Répondit-elle donc, d’une voix un peu plus neutre. Elle allait trouver quelques élèves et leur faire dire ce qu’elle allait d’eux. Alex avait plus d’un tour dans son sac, elle ne doutait aucunement de ses capacités à les faire aller dans son sens. Elle pouvait très bien les acheter, ou utiliser une méthode beaucoup moins agréable pour eux. Dans tous les cas, elle allait trouver, ces recherches étaient trop importantes pour qu’elle ne prenne pas cette peine.
Il n'est rien de plus profitable qu'un mensonge habile.
L
es deux protagonistes de cette scène qui ne devrait rien avoir d'exceptionnelle dans un commissariat du genre savaient toutes les deux qu'elles participaient à une supercherie parfaitement huilée, et qu'il y avait un sous-texte à entendre dans chaque propos tenu. Quand Liv demandait à Alex s'il y avait des témoins pour confirmer qu'elle était bien élève au cours qu'elle avait prétendu suivre, c'était une manière pour elle de lui demander de trouver des témoins, afin de conforter son témoignage et qu'elles ne rencontrent pas des problèmes par la suite. Et quand Alex répondait qu'il y avait bel et bien des témoins, ce n'était pas parce que c'était le cas, mais c'était une façon de lui faire comprendre qu'elle allait chercher à renforcer son alibi. Liv hocha la tête. Elle faisait entièrement confiance à son interlocutrice. Elle savait parfaitement de quoi elle était capable. En termes de manipulation, elle n'avait rien à apprendre de personne, aussi la criminologue était-elle convaincue que rien ne pourrait jamais laisser présumer qu'elle ait été la complice d'une machination sordide destinée à servir la cause des mutants. Tout était son contrôle, et rien ne plaisait plus à la jeune femme que lorsque les choses, justement, étaient sous contrôle... Malheureusement pour elle, si la situation présente lui laissait penser qu'elle gérait parfaitement la situation, il y en aurait d'autres qui ne saurait que la faire douter, force lui serait de l'admettre. Mais elle était loin de ces considérations pour l'heure, et tant mieux, elle ne se concentrait que sur l'affaire qui les concernait, elle et Alex, et c'était très bien ainsi. Elle savait qu'elles seraient l'une comme l'autre totalement insoupçonnables et que ni ses collègues, ni ses supérieurs, ne se rendraient compte de quoi que ce soit, à aucun moment. Ce n'était pas la première fois qu'elle s'arrangeait avec la réalité, après tout.
-Très bien. Dans ce cas, vous nous communiquerez le nom de ces élèves afin que nous puissions les interroger, suggéra-t-elle toujours de son ton sérieux et on ne peut plus professionnel, qui ne tolérait semble-t-il aucun soupçon quand à l'investissement qu'elle mettait à la tâche et à son implication de manière générale.
Elle nota quelques mots sur une feuille qui se trouvait face à elle. Elle avait toujours la manie de prendre des notes, quelles que soient les circonstances. Même quand ces notes n'étaient pas réellement nécessaire, même quand sa mémoire universelle faisait de toute façon très bien le travail à sa place. Normalement. Elle poussa un léger soupir, plus pour marquer une intonation que pour témoigner d'une émotion quelle qu'elle soit.
-Je crois que nous avons fait le tour. Si vous n'avez rien d'autre à ajouter, vous êtes libre de partir. Elle adressa à Alex un regard entendu qui, seul, témoignait du double sens de la phrase qu'elle prononcerait ensuite, de son habituel ton on ne peut plus impassible. Nous nous reverrons bientôt, dans tous les cas.