V

anessa examina le fond de son portefeuille avec lassitude... ça n'avait pas mordu fort, cette nuit. Il faut dire qu'elle n'avait pas été gâtée, question clientèle : aucun habitué, quelques pervers aux délires beaucoup trop suspects pour elle (et pourtant, elle était du genre à en accepter plus que pas mal de ses "collègues", mais au bout d'un moment, il ne faut pas déconner non plus)... et globalement, on avait trouvé plus d'intérêt à ses voisines qu'à elle. Bon, avait quand même enchaîné deux trois passes, mais c'est certainement pas avec ça qu'elle allait s'acheter une maison en bord de mer, deux chiens et trois chats... Déjà, si elle parvenait à payer son loyer, ce serait un début.

Enfin, elle avait fini son service, et puisqu'elle ne rentrait avec aucun homme à son bras cette nuit, elle allait pouvoir rentrer directement chez elle. Tant mieux, elle avait eu hâte d'en avoir fini. Elle n'irait pas prétendre qu'elle vivait l'enfer sur terre, elle était de ces femmes qui avaient choisi la prostitution... c'est pas pour autant qu'elle crachait sur le fait de ne pas avoir à écarter les jambes plus tôt que prévu, même si le porte-feuille criait rapidement famine.

Ses talons claquaient sur le pavé. Talons trop haut, robe trop courte. Son uniforme de travail, quoi. Au moins, c'était l'été, elle ne risquait pas de choper la crève (inconvénient du métier trop peu souvent invoqué). Elle ne prêtait pas attention à ce qui l'entourait, et elle aurait sans doute dû, car trois hommes lui faisaient à présent face, le genre de type qui se baladent toujours en bande, quelques relents de masculinité toxique pour bien lui pourir les narines et un sourire carnassier sur leur visage qui pourrait se traduire, sûrement, par quelque chose du genre : "Nous, on paye pas, poupée" (le genre de gars à dire "poupée"). Ils se rapprochèrent, elle fouilla dans son sac à la recherche de sa bombe lacrymo... Mais l'un des gars fut plus rapide, lui enserra le poignet si brutalement qu'elle gémit de douleur.

Puis... surgi de nulle part. Son chevalier blanc. Non rouge. Costume inexplicable de type délire SM un chouias extrême... et en quelques minutes, les trois mecs étaient au sol. D'accord... sans doute un de ces super-héros dont New York pullulait. Mais Vanessa ne se sentait pas rassurée pour autant... Dans le doute, mieux valait qu'elle prenne la fuite sans demander son reste, elle réfléchirait ensuite à...

-Wade... ?

Non... C'était absolument impossible. Wade était mort. Elle était en train de délirer.
Pourtant, cette voix... elle se sentait capable de la reconnaître entre mille.

code by Mandy

U

ne foule de sentiments contradictoires envahissait Vanessa. Elle était heureuse d'entendre le ton de sa voix, bien sûr, parce qu'il lui avait atrocement manqué, parce qu'elle n'avait jamais cessé de l'aimer, pas même une seule seconde, depuis son départ. C'était comme un rêve étrange (sous LSD pour le coup) qu'elle ferait, là, tout de suite, et si elle n'écoutait que son coeur, sans doute qu'elle lui arracherait le stupide masque qu'il avait sur le visage et l'embrasserait à en perdre haleine, quitte à réfléchir aux conséquences plus tard.

Mais d'autres sentiments, d'un tout autre ordre, faisaient clairement barrage à cette réaction instinctive. Et parmi ces sentiments d'incompréhensions et de peur, il y avait, prédominante, la colère. Il revenait là, comme une fleur, alors qu'elle l'avait cru mort, lui servait du "bébé"... Et par-dessus le marché prétendait qu'elle lui avait manqué alors que c'était lui qui était parti, lui qui lui avait laissé croire le pire, lui qui l'avait laissé seule alors qu'elle avait été déterminée à se battre pour lui, à ses côtés. Elle avait envie de lui en mettre une, là, tout de suite... Elle ne savait pas ce qui la retenait exactement. A part peut-être ce soupçon de curiosité. Elle avait envie d'entendre ces explications, même s'il était évident à ses yeux que rien ne saurait justifier sa disparition.

-Des imprévus, tu te fous de moi ? dit-elle, en toisant ce qu'elle pouvait de lui, c'est-à-dire pas grand-chose à travers ce fichu costume. Aucun "imprévu" ne pouvait servir d'excuse à son départ, certainement pas. Je sais pas ce qui me retient de... De lui en foutre une, là, un coup bien placé direct entre les bijoux de famille, exutoire à sa rage. Ca viendrait peut-être, car Vanessa voyait difficilement comment Wade réussirait à justifier son comportement sans s'en manger une au passage, mais avant, elle voulait tout de même entendre ses explication. Enlève ce putain de masque.

Elle avait besoin qu'il la regarde dans les yeux, tandis qu'il chercherait sans doute péniblement à lui apprendre une vérité qui à coup sûr lui ferait du mal. Et plus simplement, elle avait besoin de le voir, de retrouver son visage en plus de sa voix. Pourquoi ce masque et ce costume, d'ailleurs ? Vanessa espérait que ça faisait partie des justifications qu'il allait lui accorder... même si le tout assemblé n'avait aucune chance de faire sens... Tout ce que ça lui suggérait, c'est qu'estimant qu'il n'avait plus rien à perdre, il avait décidé de jouer les justiciers masqués à l'instar d'un Spider-Man vénère, les loups solitaires qui n'auraient évidemment pas à s'embarrasser d'une fiancée qui l'attendait pourtant désespérément.

code by Mandy

Q

uand Wade lui refusa de retirer son masque, Vanessa fut bien tentée de le lui retirer de force. Il était hors de question qu'ils continuent cette conversation sans qu'elle puisse au moins le regarder dans le blanc des yeux. Qu'il ne soit pas même capable de lui accorder cette seule faveur n'arrangeait en rien la colère qu'elle ressentait en cet instant. Il s'en fallut de peu, d'ailleurs, pour qu'elle lui arrache ce masque de force, ce qu'elle ne fit pas uniquement parce qu'elle se laissa interpeller par les propos qu'il lui tint alors. Il ne voulait pas qu'elle voit son vrai visage, parce qu'il voulait qu'elle garde une bonne image de lui. Pas de bol, pour ce qui était d'avoir une bonne image de lui, pour le moment, c'était raté, parce que jusqu'ici, il ne la convainquait absolument pas d'avoir eu de bonnes raisons de partir. Sauf qu'il n'en avait pas fini...

Et pour le coup, elle qui avait voulu des explications, elle était servie, et pas qu'un peu. Elle avait espéré qu'il accepte enfin de lui parler de ce qui lui était arrivé, elle ne s'attendait pas en revanche à ce flot de parole, qu'elle écouta sans l'interrompre. Il était désolé. C'était un début, mais ce n'était pas assez. Encore heureux, qu'il était désolé ! Vu les circonstances et la manière dont il l'avait laissée (donc pas de manière du tout), elle estimait que c'était la moindre des choses. Elle serra les dents quand il ajouta qu'il était partie pour qu'elle ne le voie pas mourir. Elle était capable de comprendre l'intention, certes, mais elle ne la cautionnait pas pour autant. Elle était là pour lui, elle était prête à l'accompagner jusqu'au bout. Elle aurait été là dans les tout derniers instants, et même s'il avait fallu l'avoir à charge, s'occuper de lui dans des proportions qu'il aurait peut-être trouvé dégradantes, elle aurait largement préférait ça à son absence. Elle avait été prête à lui jurer amour et fidélité dans la santé comme dans la maladie, et lui, il avait brisé ce voeu avant même qu'elle ait eu le temps de le formuler.

Le reste... était surréaliste... Même dans un univers qu'on savait peuplé de mutants, d'extraterrestres et de superhéros, ce n'était pas pour autant le genre de récit simple à encaisser. Mais elle savait qu'il était sérieux. On l'avait torturé jusqu'à sa mutation. Il était devenu immortel, avec des séquelles apparemment irréversibles. C'était horrible, et surtout, c'était inutile. Il avait survécu au pire, ses jours n'étaient plus en danger, et pourtant il n'était pas revenu. Parce qu'il était apparemment dans ce fameux état qu'il ne lui laissait même pas voir.

-J'avais pas besoin que tu me protèges, et c'est à moi de décider ce que je mérite d'avoir ou pas, j'avais besoin que tu sois là, je méritais que tu sois là, répliqua-t-elle alors. Elle lui en voudrait presque de lui faire comprendre qu'il en avait tant bavé, comme si sa douleur à elle allait tout à coup devenir accessoire, parce qu'elle n'avait été "que" psychologique. Et t'es là maintenant, alors si vraiment tu crois que je vais juste te regarder t'en aller sans rien faire, tu ne me connais vraiment pas. Elle marqua une pause. Si tu penses vraiment être horrible à ce point-là, laisse-moi au moins voir pourquoi je devrais ne plus vouloir de toi - en dehors du fait que tu as agi comme un sale connard égoïste. Elle croisa les bras. Ôte ce putain de masque ou je plante mon genou dans tes couilles immortelles.

code by Mandy

V

anessa n'eut pas besoin d'insister davantage, Wade finit par céder et par accepter de retirer son masque. Elle se fichait bien de ce qu'elle allait voir là-dessous (même si elle appréhendait tout de même un peu, on ne va pas se mentir), elle voulait lui parler en le regardant dans le blanc des yeux. Et en effet... son regard était bien la seule chose qui n'avait pas changé, ce regard qui faisait qu'elle l'aurait reconnu entre tous, au-delà de sa voix, en dépit de son apparence ravagée. Car oui, elle n'allait pas mentir, Wade était... horrible à voir. Il ne charmerait plus jamais personne avec son joli minois. Elle retint de justesse un mouvement de recul. Pas d'horreur, mais de surprise. Elle avait beau s'être préparé à du... moche, elle n'avait pas eu le pouvoir de visualiser une chose pareille. C'était étrange... c'était lui, tout à fait lui, et en même temps, il n'était plus le même, et il ne le serait plus jamais, elle le savait malheureusement.

Est-ce qu'elle avait envie de fuir ? Non. Est-ce qu'elle le trouvait encore attirant ? Faut pas déconner. Mais le bonheur de l'avoir retrouvé (même si elle était toujours en colère, n'abusons pas) dépassait de très loin toute autre considération. Il était qui il était, et cela faisait longtemps qu'elle l'aimait bien au-delà de son apparence. On était pas dans un conte à la con de type la Belle et la Bête, où la leçon est d'apprendre que la vraie beauté était celle du coeur (parce que la beauté de coeur de Wade Wilson, dans ce cas là, restait tout de même quelque chose de tout à fait approximatif), mais on s'en approcherait presque. En tout cas non, elle ne comptait pas fuir, et elle lui en voulait un peu qu'il puisse s'imagine que ce soit le cas.

-Tu sais... quand on te regarde pas trop longtemps, ça pique à peine les yeux. Elle marqua une légère pause. Et on peut faire tout un tas de choses sans se regarder, ajouta-t-elle.

Pourtant, loin de détourner les yeux, elle le dévisageait. Pas pour le considérer dans toute son horreur, mais pour profiter de tout ce qu'elle reconnaissait encore en lui : l'intensité de son regard, l'ovale de son visage, ses micro-expressions, ses sourires... Avec précaution, elle approcha ses doigts de ses joues et les caressa doucement. Rien n'était pardonné, encore, mais pour l'instant, elle était à la redécouverte de celui qui lui avait manqué au-delà de toute colère, au-delà de tout ressentiment.

-Est-ce que ça te fait mal ?

code by Mandy

W

ade posa ses mains sur les siennes. Elles étaient gantées, et ce n'était pas en soi le contact le plus agréable qu'on puisse imaginer, techniquement, mais en cet instant, elle ne l'aurait échangé pour rien au monde. Elle songeait qu'elle aurait pu reconnaître ces mains entre toutes, même ainsi parées, elles qui avaient parcouru avec désir et sans pudeur le moindre millimètre carré de son corps. Elles qui lui avaient tant manqué. Il était là, il était vivant, il n'allait plus mourir, et il semblait l'aimer encore.

Elle voudrait dire que tout était parfait (légère exception faite de son corps ravagé, mais honnêtement, si c'était la seule contrepartie à son retour dans sa vie, elle l'acceptait un milliard de fois)... Le retrouver, elle n'avait cessé d'en rêver, même quand elle le croyait mort. Mais... est-ce que c'était si simple ? Non, ce n'était pas si simple, il était reparti, comme un voleur, il l'avait abandonné, et quand finalement, il avait su - de la pire manière certes mais avec succès - se débarrasser de ce fichu cancer de merde, il n'était pas revenu vers elle. Qu'est-ce qu'elle en avait à foutre, elle, qu'il la surveille à distance. Elle avait besoin de lui, au quotidien, comme avant, s'endormir et se réveiller dans ses bras, retrouver leurs projets, leurs habitudes, leurs rituels...

-Tu fais chier, Wade, décréta-t-elle en se reculant d'un pas. Oui, il faisait chier, parce qu'elle mourrait d'envie de lui pardonner, mais en même temps, elle ne pouvait pas contenir son amertume et sa colère. Cette situation lui donnait la preuve qu'il l'avait abandonnée. Qu'est-ce que je suis supposée faire, maintenant ? Te prendre au beau milieu de la rue et faire comme si tu n'étais pas parti, comme si tu ne m'avais pas abandonnée ? Est-ce que tu serais revenu vers moi si je t'avais pas reconnu... ? Non, elle connaissait déjà la réponse. J'ai cru que tu étais mort, putain. Tu imagines ce que j'ai ressenti ?

Elle sentit les larmes lui monter aux yeux. C'était beaucoup, beaucoup trop d'émotions, toutes contradictoire, d'un coup. Et oui, elle ne savait vraiment pas ce qu'elle pouvait espérer faire maintenant. Elle savait qu'elle ne pourrait plus laisser partir Wade maintenant qu'elle l'avait retrouvé. Mais elle était blessée.

code by Mandy

W

ade s'approcha d'elle et la serra dans ses bras. Un instant, elle envisagea de se dégager de cette étreinte... mais elle en était finalement bien incapable. Peut-être bien que le corps que dissimulait ce costume n'était plus du tout le même qu'à l'époque, mais cette étreinte, elle l'aurait reconnue entre mille, et elle était incapable de ne pas vouloir demeurer au creux de ses bras après qu'il lui ait tant manqué. Et elle s'en voulait. Parce que c'était trop facile. Il revenait comme une fleur après toute cette absence, après qu'elle l'ait cru mort, bordel. Et elle, elle se laissait avoir... Mais c'était plus fort qu'elle. Au-delà de la colère, c'était toujours de l'amour qu'elle éprouvait pour lui. Il restait l'homme de sa vie malgré tout, et elle n'avait pas envie de le perdre, elle n'avait pas envie qu'il s'évanouisse à nouveau dans la nature, au risque de ne plus le revoir, de ne plus jamais avoir de ses nouvelles. Elle serait incapable de le supporter.

Oui, elle avait toutes les raisons du monde de lui en vouloir, c'était un fait, mais elle n'avait pas envie de perdre le temps qu'elle devrait consacrer à l'amertume et aux représailles. Il comprenait sa colère, c'était déjà ça... Mais surtout, il voulait recommencer, avec elle. Mais est-ce que c'était vraiment possible. S'il était venu frapper à sa porte et l'avait supplié de la reprendre, ça aurait été une autre affaire, mais c'était un hasard total qui l'avait à nouveau plongée dans les bras de Wade... et elle savait que sans ça, ils ne se seraient sans doute jamais retrouvés. Peut-être qu'il fallait tout simplement féliciter le hasard. Mais elle n'était pas sûr de le vouloir. Elle n'était pas du genre à croire à ces conneries. Le hasard, le destin... très peu pour elle, vraiment.

-Tu aurais dû revenir..., dit-elle alors simplement. Je sais pas quoi faire. Elle prit une grande inspiration. T'as agi comme un connard de première, t'es vraiment une enflure, mais... je t'aime. Je veux pas te perdre de nouveau.

Et elle comprenait que ce n'était pas possible. Pardonner, tout de suite, n'était pas dans ses cordes. Mais en revanche, lui donner une seconde chance était bel et bien une possibilité.

code by Mandy

I

l était encore temps. Temps de foutre à Wade une raclée monumentale, d'envoyer son genou entre ses jambes, de lui faire du mal comme lui-même lui en avait fait, même s'il était évident (et on ne pouvait clairement pas passer à côté de l'information) qu'il avait très gravement souffert durant ce temps où il s'était juste... effacé de sa vie. Oui, il était encore temps, juste comme ça, pour évacuer ce sentiment de hargne tenace qui la prenait aux tripes, mélangé à tant d'autres sentiments qu'elle ne savait plus trop identifier précisément celui qui dominait.

Il était temps, encore, oui. Mais de quoi avaient-ils le temps exactement ? Ils ne pouvaient pas savoir. Si ces putains de circonstances leur avaient appris quelque chose, c'était au moins ça. Ils n'avaient aucun moyen de savoir. Et le mieux, dans le foind, c'était sûrement de se satisfaire de ce sur quoi ils avaient prise, de ce qui restait à leur portée, de ce qu'ils étaient vraiment capables de contrôler, le fait qu'ils étaient ensemble, là, tout de suite, et qu'ils n'avaient manifestement pas envie d'être où que ce soit ailleurs.

Il l'aimait plus que tout, il le lui disait. Elle pourrait décider qu'il mentait et choisir de ne pas le croire. Après tout, comment pouvait-il prétendre l'aimer et en même temps lui faire endurer ce qu'il lui avait fait subir. Et pourtant, elle n'arrivait pas à se dire, même une seule seconde, qu'il la menait en bateau. Et elle avait envie d'avoir encore un milliard d'occasions de l'entendre le lui dire, et de le lui dire en retour. Est-ce que ça pouvait juste se passer comme ça ? Sur cet aveu tout simple. Ils ne pouvaient pas reprendre le fil de leur vie comme elle était avant, mais... Mais en même temps, leur vie comme elle était maintenant craignait sérieusement. Ou en tout cas, sa vie à elle craignait sérieusement. C'était franchement lamentable. Elle avait bien le droit d'essayer, au moins, d'avoir mieux, pas vrai ? Elle l'avait largement mérité en tout cas.

Elle laissa passer un instant de silence. Une part d'elle hésitait toujours à lui en foutre une, juste pour le geste, plus symboliquement qu'autre chose. Mais s'il y avait un geste qu'elle voulait lui adresser en priorité, ce n'était pas spécialement cette rouste qu'elle avait menacé de lui flanquer en le traitant de tous les noms. Après quelques secondes, un fin sourire se logea sur son visage, et elle reprit la parole.

-Qu'est-ce que t'attends pour me rouler la pelle de ma vie ?

code by Mandy

N'

allez pas croire que la colère avait complètement déserté Vanessa, ce n'était pas le cas du tout. Elle était en colère contre Wade, mais plus encore contre les circonstances, même si elles leur avaient tout de même permis de se retrouver, quand bien même, sans que ce soit trop tard non plus, c'était tout de même bien trop tard par rapport à ce qu'elle aurait voulu. Oui, elle était en colère, mais ce n'était rien en comparaison de cet autre sentiment qui acceptait enfin de se faire une place plus vivace dans son coeur et dans son esprit : elle était heureuse.

Tout était allé si vite que c'était à peine si elle réussissait à prendre conscience que tout ceci était vrai, qu'elle n'était pas en plein trip alcoolisée, en pleine descente de stupéfiant, qu'il était bien là face à elle, certes défiguré, mais tout de même bien présent, bien vivant... Immortel, même, le putain de veinard. Même si Vanessa ne savait pas si elle-même troquerait son joli minois et sa plastique avantageuse contre quelques bribes d'éternité. Peut-être que oui. En fait, pour être avec Wade, si, c'était même certain.

C'était réel, bien réel, elle ne pouvait plus avoir aucun doute alors que ses lèvres goûtaient à nouveau aux siennes. Physiquement, il n'était plus du tout le même, soit, mais ses lèvres contre les siennes lui procuraient une sensation qu'aucune autre ne pouvait espérer lui procurer. Elle s'était souvent dit que leurs corps étaient faits l'un pour l'autre. Ils s'emboîtaient parfaitement, comme les pièces d'un puzzle (on pouvait largement y donner toutes les interprétations salaces possibles, elles étaient, en l'occurrence, les bienvenues)... C'était toujours pareil. Elle lui rendait son baiser avec autant de passion qu'il était capable lui-même de lui en adresser, collée à lui, les mains agrippées à son dos. Elle attendit de ne plus avoir de souffle pour daigner détacher ses lèvres des siennes. Bon sang... comment avait-elle seulement pu se passer de lui si longtemps ? Comment avait-elle réussi à lui survivre ? A présent qu'elle l'avait retrouvé, c'était juste impensable.

-Tu vis où, maintenant ? demanda-t-elle sans trop éloigner ses lèvres des siennes.

La curiosité motivait en partie sa question, mais pas seulement, elle estimait que la suite de leurs retrouvailles exigeaient un cadre bien plus intime... quand bien même ils avaient aussi encore beaucoup de choses à se dire.

code by Mandy

D

es conversations éprouvantes, qui ne leur feraient certainement pas plaisir et qui devraient revenir sur le passé qu'ils n'avaient pas eu en commun (la faute à qui...), ils en auraient encore, il le faudrait bien, car tout était loin d'avoir été mis à plat encore. Mais Vanessa était capable malgré tout de laisser ça de côté pour le moment. Surtout, elle avait besoin de laisser ça de côté pour le moment. Elle voulait profiter de ses retrouvailles avec Wade, du goût de ses lèvres contre les siennes. Réaliser pleinement, complètement, qu'il était en vie, bien en vie, et que cette fois, elle ne le laisserait plus jamais partir sans savoir où il se trouvait. Alors oui, elle voulait juste aller chez lui, le retrouver au sens le plus physique du terme, et ne plus penser à rien qu'à lui.

Chez lui, c'était donc aussi chez une petite vieille cocaïnomane que Wade soupçonnait d'être amoureuse de lui... charmant, comme portrait. Mais ça lui ressemblait bien. Et au final, ce n'était certainement pas la plus grande absurdité qu'il lui ait confiée et qu'elle ait accepté de prendre pour argent comptant le concernant. Elle voulut répondre quelque chose, mais elle n'en eut pas le temps. Car Wade décida de joindre l'acte à la parole en le conduisant chez lui d'une manière on ne peut plus inattendue. Attendez... Il venait vraiment de la téléporter, là ? Sonnée par ces découvertes successives, elle ne parvint à reprendre la parole qu'alors qu'ils rejoignirent sa chambre.

-Alors, d'une, dit-elle une fois que Wade eut refermé la porte de sa chambre derrière lui. Al est un vrai canon pour son âge, je comprendrais complètement que t'aies pas pu résister. De deux, cet appartement ressemble au placard poussiéreux dans lequel mon ivrogne de grand-oncle avait l'habitude de me molester. De trois... On vient de se téléporter ou je rêve ?

Ils pourraient parler de toute autre chose, partager bien d'autres choses, mais pour le moment c'était définitivement ce qui lui venait à l'esprit. Et avant de faire ou de dire quoi que ce soit d'autre (même s'ils n'avaient techniquement pas tant besoin de parler que cela), elle préférait largement mettre ces quelques petites choses au clair. Enfin, la dernière surtout, bien sûr, les autres étaient évidemment accessoires.

code by Mandy

V

anessa écouta d'une seule oreille les arguments de Wade. Elle se fichait pas mal de l'endroit où il vivait, en réalité, puisqu'il vivait, et ça, clairement, c'était ce qu'il y avait de plus exceptionnel pour elle. Oui, cet endroit était absolument invivable, mais peu importe, c'était chez lui, et même si elle éprouvait toujours un fond de colère à l'idée qu'il se soit trouvé là tout ce temps sans envisager de lui signaler, d'une manière ou d'une autre, qu'il était encore là, elle occultait bien vite cela.

Il suffisait qu'elle entendre le son de sa voix pour se rassurer et se sentir parfaitement bien. Il y a des personnes, comme ça, vous les avez dans la peau pour toute votre vie, c'est comme ça, et y a rien que vous puissiez faire contre. C'était clairement son cas à elle, et elle était plus qu'à même de l'accepter maintenant qu'elle savait que Wade était vivant. Mieux que ça, même, Wade était increvable.

-Hors de question que tu restes dans ce bouge, de toute manière, tu vas venir chez moi, décréta Vanessa d'un ton qui ne tolérait aucune réplique.

Bien sûr, c'était aller vite en besogne que de suggérer qu'il devait vivre chez elle, mais elle préférait considérer son absence comme une parenthèse que comme quelque chose qui les oblige à reprendre de zéro. Ne serait-ce que parce qu'ils avaient déjà perdu beaucoup trop de temps. Ils vivaient ensemble avant que Wade ne disparaisse de la circulation du jour au lendemain, et ils vivraient ensemble maintenant qu'il était de nouveau là. Elle ne voulait pas le perdre de vue quoi qu'il en soit, pas même une seconde. C'était un risque qu'elle était dans l'incapacité entière et totale de courir.

-C'est plutôt cool, je le reconnais, admit Vanessa avec un fin sourire aux lèvres quand Wade lui parla dans plus de détails de ce gadget qui lui permettait de se téléporter où il voulait. On n'allait pas se mentir, c'était effectivement hyper-cool, et ça pouvait servir dans pas mal de circonstances. T'en as d'autres, des gadgets du genre en réserve ? Elle se rapprocha de lui, le regard pétillant. Est-ce que je dois m'attendre à d'autres... surprises ?

Des surprises qui pouvaient être d'à peu près tous les ordres, pour le coup. A ce stade, on pouvait dire qu'elle était blindée, quelque part.

code by Mandy

V

anessa rendit à Wade son sourire. Il était bien possible qu'elle ne prenne pas véritablement la pleine mesure de toute cette situation. Tout était si inattendu, si brutal et si irréel qu'il devenait difficile, forcément, de faire la part des choses entre ce qui était raisonnable, ce qui était insensé, et ce qu'il fallait écouter de raison et accepter de folie. Elle n'arrivait pas à raisonner convenablement en présence de Wade parce qu'elle ne pensait qu'à une chose, et c'était au fait qu'elle l'avait retrouvé alors qu'elle pensait l'avoir perdu pour toujours.

Impossible, à partir de là, de juste se contenter de faire ce qui était le plus sensé. Si elle rentrait chez elle maintenant et le laissait juste vaquer à ses occupations, quelles qu'elles soient, elle aurait la peur au ventre et la crainte de ne plus le revoir. Elle préférait regretter de temps à autre sa décision de lui pardonner l'impardonnable plutôt que d'avoir le regret de ne pas l'avoir retenu quand elle en aurait eu l'occasion. Son occasion, c'était ici et maintenant. Et non, il avait intérêt à ne pas lutter. Il lui était peut-être revenu en mode hyper-badass et inhumain, elle s'en fichait, elle était toujours capable de le mettre à l'amende si elle le décidait.

La question de Vanessa était à évidemment plusieurs sens, quand elle demandait quelles surprises il lui réservait encore, elle ne faisait pas forcément uniquement mention du gadget assez incroyable qu'il venait d'utiliser pour l'impressionner. Cela pouvait s'entendre de manière absolument triviale également. Même si cela faisait beaucoup trop longtemps qu'ils n'avaient pas eu l'occasion de se voir, tous les deux, ça ne changeait quand même rien : ils étaient toujours maîtres dans l'art du double sens, et ils en usaient et abusaient comme bon leur plaisait. C'était une recette qui fonctionnait particulièrement bien avec eux, alors pourquoi s'en priveraient-ils pas vrai ?

-Pas tous..., répondit Vanessa en adressant à Wade un regard sans équivoque quand il lui fit remarquer que dans sa collection de "gadgets", il y en avait un certain nombre qu'ils avaient déjà testé. J'en ai assez des surprises. Je serais pas forcément contre quelque chose de plus traditionnel. Elle marqua une pause. Si jamais c'est devenu trop subtil pour toi, je parle de tirer notre coup à l'ancienne. Elle glissa ses doigts entre ses jambes. Je veux m'assurer que tout est fonctionnel, là en-dessous.

code by Mandy

-N

e prends pas trop la confiance non plus, Wade, répliqua Vanessa avec, aux lèvres, un sourire bien trop mutin, et au creux des prunelles une étincelle bien trop singulière pour que son interlocuteur puisse vraiment croire qu'elle était sérieuse.

Est-ce que ça voulait dire que tout était oublié ? Certainement pas. Il était impossible pour elle d'oublier la douleur infinie qu'elle avait ressentie au moment de le croire mort, au moment de penser qu'elle ne le reverrait plus jamais. Mais elle pouvait bien mettre ses considérations en veilleuse si cela pouvait lui permettre de retrouver Wade dans son entier, par tous les aspects qui faisaient de lui l'homme qu'elle aimait plus que tout au monde, même après tant de temps passé sans lui.

Et oui, rien ne pouvait changer ça, pas même la rancoeur ou la colère, par même son visage défiguré. Elle s'en fichait de ça. Elle n'attendait pas de lui qu'il soit un canon ultime de beauté, elle attendait juste de lui qu'il soit là, qu'il soit lui-même, et c'était tout. Bien sûr qu'elle n'en avait pas fini avec les reproches, et qu'il y aurait encore droit. Mais pour le moment, l'urgence de le garder auprès de lui transcendait plus que largement toute autre considération. Elle avait besoin de le retrouver, et de savoir qu'il était là, pour de bon, faire tout ce qu'elle pouvait, tout ce qu'il fallait, pour le retenir, parce qu'elle ne pourrait pas vivre sans lui... La question ne se posait même pas : elle en serait tout bonnement incapable, quoi qu'elle puisse dire ou faire.

Elle ne prit pas le temps d'argumenter cependant, parce que l'heure n'était définitivement plus aux mots, et qu'elle se sentait bien plus concernée, en réalité, par la chaleur de ses lèvres contre les siennes, qu'elle embrassait avec toute la passion que lui inspiraient ces retrouvailles. Ses lèvres qui semblaient faites pour l'embrasser, et dieu sait qu'elle avait dû en rouler, des patins à d'autres hommes - et pas que des hommes. Sa langue cherchait la sienne, ses dents mordillaient sa lèvre inférieure, elle s'abandonnait au plaisir de le sentir tout contre elle.

Et ce n'était pas assez encore, elle avait besoin de ressentir sa peau contre la sienne peu importe que cette peau soit altérée par les circonstances. Petit à petit, elle s'appliquait à le déshabiller, et au gré de ses caresses, à redécouvrir du bout des doigts ce corps buriné, si différent et en même temps si semblable.

code by Mandy