Scott avait toujours adoré le soleil : petit, il se levait à l’aube, rien que pour admirer le lever de soleil, au grand désarroi de ses camarades de chambre, à l’orphelinat. Il aimait la sensation de la lumière qui s’aventure sur le monde, faisait reculer les cauchemars et les ténèbres, l’éblouissant de sa clarté étincelante. Et même maintenant, même en étant un mutant, même en ne pouvant pas enlever ces foutues lunettes sans risquer de faire du mal à quelqu’un, il aimait toujours autant cette sensation. Tant pis pour la couleur, il se contentait de fermer les yeux et de sentir la chaleur de l’astre du jour sur sa peau, comme un baume apaisant qui l’aidait à se souvenir qu’après la nuit, toujours, revenait la lumière. C’est pour ça que Scott était debout aussi tôt ce matin, alors qu’il faisait encore nuit. Il avait enfilé un blouson, démarré sa moto et c’était rendu à l’un de ses spots préférés, une colline surplombant la baie de New-York. Un endroit magnifique, magique presque, si tant est que la magie puisse réellement exister. Il en était l’exemple parfait, non ? La magie n’existait pas, il y avait toujours une explication logique. Rationnelle. Scott avait toujours été du genre rationnel, de toute façon. D’aussi loin qu’il pouvait s’en souvenir.
Pas qu’il est des souvenirs très précis, en réalité. Mais qu’importe, ce qu’il avait, il s’y raccrochait, chérissant ces bribes de son passé. Même s’il se forgeait de nouveaux souvenirs à côté de ceux-ci. Les yeux fermés, attendant le moment où le soleil allait se lever, les pensées du jeune mutant dérivèrent sur Jean. C’était un peu tendu, entre eux, en ce moment. Et encore, un peu était un euphémisme. Depuis toute cette histoire, il avait tendance à la surprotéger, à la surveiller, à l’étouffer. Et bien qu’il en soit conscient, il ne pouvait s’en défendre. C’était sa façon d’être, veiller sur ceux qu’il aimait, sur ses coéquipiers, sur ses jeunes élèves. Scott qui portait le poids du monde sur ses épaules. Cyclope qui se chargeait de tous, veillant sur chacun de ceux avec qui il partait en mission. Protecteur. Trop protecteur, visiblement. N’importe quel psy aurait ramené ça à la mort de ses parents, ça et sa volonté de ne pas montrer son attachement à qui que ce soit. On lui reprochait souvent de se montrer froid et distant, une facette de son caractère que bien plus de gens connaissaient. Détaché. Histoire de ne pas souffrir. Peut-être. Il n’avait pas besoin d’en parler à un psy, de toute façon, il le savait déjà, alors autant s’épargner la consultation. Et puis, s’il éprouvait le besoin de parler, de se confier, le professeur Xavier semblait tout indiqué : l’homme était sage, intelligent, et avisé. Prêt à le remettre sur le droit chemin. En parlant de droit chemin, d’ailleurs... ses cours commençaient dans quelques heures, et il fallait mieux qu’il rebrousse chemin.
Mais c’était sans compter ce qui l’attendait sur la route. Des cris, des gens pressés qui s’éloignaient le plus possible, traversant la route sous les klaxons indignés des conducteurs. Il se passait quelque chose, et même s’il n’était pas en costume, Scott s’avança, curieux. Et bien décidé à aider, s’il se trouvait qu’il puisse être d’une aide quelconque. Au travers des mots angoissés de la foule, il comprit rapidement que quelque chose se tramait au Brooklyn museum, encore fermé à cette heure matinale. Quelque chose qui requérait l’intervention des X-mens ? Il n’en avait aucune certitude, mais puisqu’il était sur place, autant s’en assurer. Le mutant gara son véhicule sur une place de stationnement, s’approchant à pied du musée, à contre-courant de ceux qui cherchaient à en fuir les environs. Evidemment, se faufiler par la porte principale était hors de question : mieux valait être discret. Scott s’avança, scannant du regard le bâtiment à travers ses lunettes, avant de distinguer une porte entrouverte. La sortie de secours… ou, plus sûrement, celle du local poubelle. Qu’importe. Il voulait s’assurer de ce qui se trouvait à l’intérieur. Evidemment, il n’agissait pas sous l’identité de Cyclope, mais qui irait chercher plus loin qu’un jeune homme curieux, en vérité ?
anda ignorait tout de la matière, le sens, l'usage, l'intérêt de cet artefact. Elle était curieuse d'en apprendre plus, bien sûr, mais ce n'était certainement pas les quelques mots elliptiques et lacunaires qui présentaient ce cube de matière lourd qui auraient pu lui en dire davantage. Tant pis, elle acceptait de ne rien savoir de ce qu'elle était en train de dérober. Comme bien souvent, elle se contentait d'appliquer les ordres de Magnéto et tolérait de n'être que partiellement informé de ce pour quoi on la débauchait. Inconscience de sa part ? Peur d'une curiosité qui pourrait lui nuire ? Simple robotisation ? C'était à la fois tout cela et bien plus complexe que cela. Wanda ne pouvait pas quitter Magnéto. Elle ne le pouvait pas, c'est tout, elle avait envers lui une dette incommensurable, et si même le départ de son frère n'avait pas pu la faire changer d'avis, rien d'autre n'en serait capable. Quand il donnait des ordres, donc, en bonne Confrériste, elle se devait de les suivre. Un point c'est tout. L'artefact se trouvait au Brooklyn Museum, et les directives paraissaient en soi être simplissimes : se rendre au musée avant l'heure d'ouverture, dérober l'objet, repartir. Ils étaient tout de même trois à devoir obéir à ses directives. Deux pour déjouer les systèmes d'alarme, de surveillance et de protection du bâtiment ainsi que pour s'occuper des gardiens. Une pour dérober le cube mystérieux. Cette dernière mission lui était revenue de droit. Et pour cause, grâce à son pouvoir de lévitation, l'objet pouvait venir à elle sans qu'elle ait besoin de venir à lui. Elle venait de récupérer l'artefact tant convoité quand le vacarme à proximité la fit sursauter.
-Merde... grommela-t-elle entre ses dents serrés avant de déposer précautionneusement l'objet au creux de son sac.
Visiblement, la mission de ses acolytes ne se déroulait pas au mieux, et la mission qui devait être simple et efficace virait à l'esclandre. Wanda aurait pu prêter main forte à ses camarades, mais elle n'y comptait pas. Elle se moquait bien de leur sort, comme de celui de toute autre confréristes. Ils étaient techniquement dans le même camp, certes, elle ne les portait pas dans son cœur pour autant. Et Magnéto préfèrerait de toute façon qu'elle revienne seule avec son larcin qu'accompagnée les mains vides. Wanda prit donc le parti de fuir à travers une porte dérobée qui devrait sans doute lui permettre de s'échapper sans contrainte, avant que de se mêler à la foule paniquée comme si de rien n'était. C'était sans compter sur l'homme face auquel elle se retrouva alors.
-Que faites-vous ici ? demanda-t-elle alors, sachant pertinemment qu'on pouvait aisément lui retourner la question, resserrant plus fermement ses doigts autour de la lanière de son sac.
Ne pas tirer de conclusions hâtives. L'inconnu pouvait n'être qu'un simple curieux, venu par l'entrée la plus accessible et discrète pour assouvir sa soif de danger. C'était encore l'hypothèse la plus appréciable.