Inside the Electric Circus

Natasha Romanov & Steve Rogers

Mes nuits étaient tout ce qu’il y avait de plus pénible dans mes journées. Depuis mon réveil, j’enchainais les cauchemars ambulatoires, à revivre des souvenirs enfouis dans ma mémoire, que je pensais oubliés et qui laissaient sur moi une culpabilité dévorante. Et pour donner le change, il y a avait les insomnies. Des nuits longues, très longues, à crever d’inactivité. A tenter d’achever des choses terminées depuis longtemps. Des choses auxquelles j’ai participé, que j’ai amorcé ... et se rendre compte qu’elles ont continué sans vous. On ne freine pas la vie. Au contentement général, on ne revient jamais pour constater le résultat. Sauf pour moi. Parce qu’il est tellement difficile de vivre et encore plus de survivre. Et certainement, demeurerait des choses que jamais je ne comprendrais. Seule l’acceptation me permettrait d’aller de l’avant. Il me fallait de même entrer dans ce cercle vicieux que rien n’arrête. Moi aussi. Dès lors, me saisit la fâcheuse attitude de tout remettre en question. Ma place au sein du Shield, les personnes qui m’entourent, la raison de ma présence ici. Si j’en fais partie, c’est uniquement parce que Peggy a contribué à le créer. Mais qu’en ont-ils fait ? La SSR avait prospéré, s’était agrandie et avait su se faire une place plus grande que celle qu’elle aurait espérée atteindre au sein du gouvernement. Personne n’ignore aujourd’hui qui est le Shield et qui en est à sa tête. Je n’arrivais pas à concevoir le changement autrement qu’avec un œil critique. Impossible de me convaincre ...
Je ne finis par trouver le sommeil que très tard dans la nuit qu’en venait déjà le jour. Et la journée qui m’attendait méritait que je sois au meilleur de ma forme. Je devais rejoindre Natasha dans les quartiers de Brighton Beach pour filer un mec qui avait tout l’air de jouer double-jeu avec la mafia russe. Il m’arrivait quelquefois de me demander comment elle avait pu rompre dans cette irrépressible envie de tourner sa veste dès que l’occasion se présentait pour tracer la route de son côté. Elle avait des états de service peu engageants, et pourtant, était un atout majeur au sein du Shield. Elle connaissait son métier et mentir était sa spécialité. Qu’avait donc était le déclencheur chez elle ? Mais déterrer de vieilles blessures n’était pas ce que je voulais, ni même lui causer du tort. Alors je garderais mes questions pour moi. C’est certainement ce que je sais faire de mieux en ce moment ...    

Le temps de prendre une douche et de boire un café, je suis déjà en route. Vêtu d’un simple t-shirt blanc, d’un blue-jean et d’une casquette aux couleurs des Yankees, je reçois en chemin son signal qui me dit qu’elle est déjà au point de rendez-vous. Comment appréhendait-elle la journée ? Routinière ? Oui, peut-être que c’était le terme. Je pris un taxi pour rejoindre little Odessa avant d’être surpris par les embouteillages habituels. Les rues foisonnaient de citoyens occupés à leurs activités quotidiennes. Difficile de prétendre à celui qui serait en mesure d’agir à mauvais escient avant de le voir commettre l’acte. Mais pour ça, je savais que je pourrais compter sur Natasha. Pour la simple et bonne raison qu’elle sait comment je fonctionne et agis. Certainement aussi bien que je peux prétendre la connaitre. Peut-être avions-nous passé nos premiers temps à nous analyser pour être certain de ne plus avoir à le faire ensuite ... Difficile à dire. Quoi qu’il en soit, j’appréciais travailler avec elle. Pour son efficacité et son savoir-faire, mais aussi pour sa fiabilité. Je suis convaincu que jamais elle ne me laissera derrière elle, et elle sait surement autant qu’elle peut compter sur moi quoi qu’il advienne. Peut-être est-ce ça, la définition d’un bon duo.
Arpentant la rue principale, je la vis, assise à la terrasse d’un café, l’air tout ce qu’il y a de plus décontracté. Personne ne soupçonnait que se tenait là la veuve noire. Elle était douée, peut-être même trop ...
Je passe à côté d’elle en lui souriant, et rentre pour commander un café noir au comptoir avant de ressortir. Je viens près d’elle et l’embrasse sur la joue, comme feraient tous bons amis. M’asseyant à ses côtés, je porte attention à chacune des personnes qui nous entourent.

« J’ai bien failli ne pas te reconnaître », lui dis-je un demi-sourire sur les lèvres. Sans nos combinaisons, on pouvait prétendre à être n’importe qui. J’avais toutefois conservé mon humour vaseux.

« La mer est calme ? », ajoutais-je regardant dans sa direction. Je savais très bien qu’elle comprendrait ma question. On avait plus vraiment besoin de faire dans l’explicite à notre niveau pour nous comprendre.

Natasha Romanov & Steve Rogers

J’adorais sa manière détournée de répondre qui me fit esquisser un sourire. Considéré comme quelqu’un de toujours trop sérieux, peu enclin à rire un peu, je remarquais qu’elle n’était pas non plus du genre à se dérider. Et pourtant, ça n’avait pas toujours été comme ça. Enfin, peut-être que pour Natasha si. On ne lui admettait pas de passé très amusant dans l’innocente enfance qu’elle n’avait certainement pas connu. Mais pour ma part, même si je ne pouvais prétendre à une enfance dorée, je n’avais pas été malheureux. Certes, elle n’excluait pas de taches sombres, mais j’avais ri et les souvenirs qu’il me restait se voyaient en majorité joyeux et heureux. On me connaissait même un certain humour dans le temps, bien qu’aujourd’hui, ma vie s’y prêtait beaucoup moins. Je ne m’étais pas bidonné à l’idée d’avoir soixante-dix ans à rattraper.

Elle me fit savoir qu’on devrait tout bientôt passer à l’action, et lui répondis d’un signe de tête entendu. Approcher notre cible ne serait peut-être pas une mince affaire, mais une femme de son allure aurait certainement plus de facilité qu’un homme de mon gabarit à l’aborder sans que cela paraisse on ne peut plus suspicieux. On se méfie rarement d’une jolie femme. A part moi surement, trop habitué à penser qu’il ne peut s’agir que d’une stratégie trop bien construite dans un but bien trop malsain que celui de souhaiter m’aborder sincèrement. J’avais quelques fois joué les intermédiaires entre les filles et Bucky, qui avaient jugé bon qu'en passant par moi, ou en se rapprochant de moi, elles pourraient l’atteindre lui, et y avait cru bêtement au départ ... Maintenant, je n’y voyais que de la méfiance et juste de la méfiance. J’espérais avoir enterré mon sourire béat qui me donnait cet air ... pas franchement fin ... mais bon on se refait pas ... Croiser mes voisines de palier qui me sourient en riant m’intimide toujours autant mais soit ...  

La serveuse vint m’amener mon café et repart aussitôt le temps de nous adresser un sourire poli. Cet interlude m’avait permis de m'informer si des regards se portaient sur nous plus que de raison. Rassuré, je m’avance légèrement posant le coude sur la table pour nous offrir ce qu’il faut de discrétion, saisissant mon café d’une main et pose mon regard sur elle.

« OK, quand il se présente, on attend qu’il entre à l’intérieur, là je l’accroche et fais ce qu’il faut pour détourner son attention, toi, tu profites de l’instant pour faire ce que tu as à faire et on ressort tout aussi naturellement », lui dis-je, conscient qu’elle devrait certainement prolonger l’instant si la situation l’invoque, auquel cas, je camperais au comptoir pour essuyer toute autre difficulté avant que l’on ressorte. On saurait faire inventif, je ne doutais nullement de nos capacités en duo. On savait s’accorder à la perfection. C’était comme si elle lisait dans mes pensées au moment même où elles s’exprimaient dans ma tête. L’inverse n’étant pas toujours vrai. J’avais bien plus de difficulté à lire en elle et certainement les choses lui convenaient-elles ainsi quand bien même cela me frustrait énormément. Elle avait cet atout majeur sur moi et sur beaucoup d’entre nous d’ailleurs. Un véritable joker dans notre jeu, certes, mais bien moins dans notre relation duale. Accepter nos différences n’était pas chose qui me perturbait plus que de raison. Certainement que la confiance qui naissait entre nous devait y être pour beaucoup.

Alors que je me réadossais au dossier de ma chaise, « Bravo » fit son entrée en scène, passant tout près pour pénétrer à l’intérieur. Il était temps pour nous de faire notre entrée. La véritable raison du pourquoi nous nous trouvions à la terrasse de ce café en cet instant T.